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Assemblée Générale extraordinairedu 16 juin 2023
L’assemblée s’est réunie, sous la présidence du recteur Armel Pécheul, le 16 juin 2023, à 17 heures, conformément à la convocation adressée aux adhérents à jour de leur cotisation.
Après avoir constaté que le quorum de 10% des membres à jour de leur cotisation présents ou représentés exigé par les statuts pour que l’assemblée puisse se prononcer sur la dissolution de l’association proposée par le conseil d’administration était atteint, le Président rappelle qu’elle avait été créée en 1983, pour faire échec au projet de Service public unifié et laïque, porté par M. Savary, ministre de l’Education nationale dans le gouvernement de Pierre Mauroy.
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Questions crucialesRéponse à une tribune
L’Obs du 8 novembre 2018 a publié une tribune[i] des syndicats majoritaires des enseignants du primaire, de mouvements pédagogiques et de la FCPE reprochant à Jean-Michel Blanquer de vouloir imposer « une conception de l’école basée sur une approche technicisée des apprentissages » qui réduirait l’enseignant « à un rôle de technicien, loin de son rôle de concepteur d’apprentissages adaptés aux besoins ».
Les critiques des auteurs de la tribune portent essentiellement sur le choix par le ministre des méthodes syllabiques d’enseignement de la lecture, dans lequel ils voient un retour en arrière funeste.
Pourtant, écrivent-ils « à la fin des années 60, alors que la méthode syllabique régnait sans partage, les premières statistiques furent sans appel : un appelé du contingent sur deux était incapable de comprendre un article de presse très simple ».
La Tribune n’indique pas la source de cette proportion, qu’une recherche sur internet n’a pas permis de trouver. Cela ne facilite pas des comparaisons, toujours délicates en raison de variations dans la définition de l’illettrisme. Essayons cependant de répondre à deux questions que suggère cette affirmation, en prenant 1969 comme année de référence.
En 1914, avec la méthode syllabique, alors que l’instruction n’était obligatoire que jusqu’à 13 ans, contre 16 en 1969, la proportion d’appelés incapables de comprendre un article de presse très simple ne dépassait pas 35 %.
S’agissant des années antérieures à 1969, Le Petit Comtois a publié dans ses éditions des 27 novembre et 13 décembre 1913 des statistiques – tirées du Journal Officiel - sur les conscrits de la classe 1911 dans les quatre départements (Doubs, Jura, Haute-Saône et territoire de Belfort) de sa zone de diffusion. Sur un total de 5927 conscrits, 56, soit un peu moins de 1% sont déclarés illettrés et 18% (1047) astreints à suivre les cours régimentaires pour insuffisance d’instruction. Le blog du Monde[ii] qui a publié ces résultats propose d’assimiler les astreints aux cours à ceux que l’on qualifie aujourd’hui d’illettrés.
Par contre, les statistiques de ces quatre départements ne peuvent être considérées comme représentatives de la France entière car, dans la carte de l’analphabétisme dressée en 1868 par Jules Simon, ils faisaient partie de la quinzaine de départements, situés dans le nord-est ou en région parisienne, où le pourcentage d’hommes âgés de 20 ans « incapables de lire ou écrire » était inférieur à 10%. Ce taux dépassait 50% dans dix départements du centre et de l’ouest ce qui conduit à une estimation de l’ordre de 25 à 30% pour la France entière.
Theodore Zeldin[iii], qui a publié cette carte dans le tome II « Orgueil et intelligence » de son « Histoire des passions françaises », indique dans le même volume que le taux d’analphabétisme était passé de 15% en 1882 pour les hommes à 4% en 1900. Il indique aussi que si l’armée ne désignait comme analphabètes que 1,9% de ses conscrits en 1914, des enquêtes révélaient que 35% avaient « une instruction nulle ou inadéquate » et « ne savaient guère que lire et écrire d’une manière la plus élémentaire ».
L’ensemble de ces résultats, s’il met en évidence la difficulté d’interprétation des évolutions de l’analphabétisme et de l’illettrisme avec le temps, en raison de différences dans la signification de ces notions montre néanmoins que sur une période d’environ 50 ans, à compter de 1868, l’un et l’autre ont fortement diminué.
Si l’on veut bien admettre que ceux qui savaient plus que lire et écrire de la façon la plus élémentaire en 1914 devaient être à même de comprendre un article de presse très simple, il faut se demander comment le nombre de conscrits que n’en étaient pas capables aurait pu être multiplié par 1,5 dans les 50 années qui ont suivi, alors que les méthodes d’apprentissage de la lecture sont restées sensiblement les mêmes pendant la période.
La proportion d’appelés de la classe 69 incapables de comprendre un article de presse très simple serait passée, si l’on en croit la tribune de 50 % alors qu’ils sortaient de l’école, à moins de 30 % quand ils ont eu 55 ans.
L’autre façon d’apprécier l’affirmation de la tribune consiste à rechercher des estimations du niveau en lecture des conscrits de 1969 dans les années postérieures.
Une enquête réalisée en 2004 par l’INSEE[iv] indique que 20% des personnes de 18 à 65 ans ont des difficultés à comprendre un texte simple, dont 23% pour les hommes et 17% pour les femmes. Les difficultés rencontrées correspondent pour une moitié d’entre eux à moins de 60 % de réussite, dont 1 % d’incapacité totale, et à entre 60 % et 100 % pour l’autre moitié.
Pour la tranche d’âge 50/59 ans, dont font partie les appelés de 1969, les taux correspondants sont de 26%, ce qui correspond à 30 % pour les hommes et 22 % pour les femmes, soit, pour les hommes, 15% entre 0 % et 60 % de réussite et 15 % entre 60 % et 100 %. Ces taux sont surestimés dans l’évaluation des difficultés associées aux méthodes d’apprentissage françaises, puisque le champ de l’étude de l’INSEE s’étend aux personnes scolarisées hors de France dans une autre langue que le français (elles sont 4 fois plus nombreuses que les personnes scolarisées en France à avoir des difficultés).
Que l’on place le curseur à 1 % (ceux qui n’ont pas pu faire l’exercice), 15% (ceux qui ont eu moins de 60 % de réussite), 29 % (ceux qui ont eu moins de 80 % de réussite) ou à 30 % (ceux qui ont eu moins de 100% de réussite), on est loin des 50 % d’appelés du contingent incapables de comprendre un article de presse très simple avancé par les signataires de la tribune.
Les progrès effectués au cours du vingtième siècle dans l’alphabétisation de la population sont dus à l’allongement des études et non à l’abandon des méthodes syllabiques
Il n’en reste pas moins que depuis 1969 des progrès ont été enregistrés dans les trois domaines fondamentaux de l’écrit, dont la compréhension d’un texte simple. En effet, si en 2004 20 % des personnes de 18 à 65 ans rencontrent des difficultés, le score est de 26 % pour les 50 à 59 ans et de 14 % pour les 18 à 29 ans. Faut-il y voir un effet bénéfique du changement de méthode intervenu vers 1970, comme le prétendent les auteurs de la tribune ?
Le niveau a monté et la démonstration en a été faite par Christian Baudelot et Roger Establet, auteurs de « Le niveau intellectuel des jeunes conscrits ne cesse de s’élever[v] », article paru en 1988 dans la revue « Economie et statistique ».
lls y écrivaient « les propos alarmistes sur la progression de l’illettrisme ne sont pas justifiés » et publiaient à l’appui de leur démonstration le tableau suivant.
Ce tableau a été établi en appliquant aux 400 000 appelés de 1982 les barèmes de notation de 1967 aux tests inchangés entre les deux dates. En 1967, les appelés étaient répartis entre 10 classes comptant chacune 10 % d’entre eux, classés selon leur résultat. Le tableau indique que les appelés de 1982 ne sont plus que 7,4 % dans cette catégorie, alors qu’ils sont 18 %, au lieu de 10 % en 1967, dans la classe des plus forts.
Cependant, autant ceux qui se sont réjoui de ce progrès que ceux qui l’ont nié semblent le plus souvent ne pas avoir pris en compte les explications que donnent les auteurs de cette évolution : Elle n’est pas nouvelle, comme le montre la comparaison qu’ils font entre les années 1948 et 1974, dont ils écrivent « les dernières classes sont désertées au profit des premières ».
Elle est, selon leurs propres termes « imputable aux progrès de la scolarisation ». Dans le détail, ils attribuent l’accroissement du nombre d’appelés ayant obtenu la note 15 ou plus à :
Pour dire les choses plus simplement, en évitant les questions de méthodologie que soulève cette étude, rappelons que les bacheliers de 1969 représentaient 17% de leur génération, alors que ceux de 2018 en représentent 80 %.
La tribune attribue aux méthodes d’apprentissage un progrès dû à l’allongement des études.
Philippe Gorre [i] "Monsieur Blanquer, nous ne voulons pas d'une école archaïque !"https://www.nouvelobs.com/education/20181107.OBS5050/monsieur-blanquer-nous-ne-voulons-pas-d-une-ecole-archaique.html
[ii] Le petit Comtois du 27 novembre (et du 13 décembre) 1913http://aetdebesancon.blog.lemonde.fr/2013/12/05/conscription-et-illettrisme/
[iii] Professeur d’histoire. Oxford University Press. Recherches, 1978, pour la traduction française.
[iv] Les compétences des adultes à l’écrit, en calcul et en compréhension oralehttps://www.insee.fr/fr/statistiques/fichier/1372029/donsoc06v.pdf
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