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Lettre N° 69 - ETAT DES LIEUX D’UN COLLÈGE PUBLIC
Avec l’aimable autorisation de l’Association rhodanienne pour la liberté de l’enseignement nous reprenons de larges extraits d’un article publié dans la lettre de l’ARLE N° 39 par un professeur de collège d’un établissement public considéré comme dans la norme.
ARLE 40 Montée Saint-Barthélemy 69005 Lyon Il semblerait que les établissements scolaires ne soient plus aujourd’hui des lieux d’études où ceux qui ont envie d’apprendre, apprennent. Il s’agit d’une sorte d’association floue où n’importe qui a son mot à dire et où tous les enfants, quels que soient leurs goûts et leurs compétences doivent entrer et rester coûte que coûte et cela jusqu’à seize ans. Peu importe ce qu’ils apprennent et comment ils l’apprennent ! L’essentiel est de les garder le plus longtemps possible et de retarder leur entrée dans la vie active. Un aperçu des multiples activités proposées dans un collège de notre grande Région et qui pourrait s’intituler : " de l’art d’occuper les enfants scolarisés " est révélateur à ce sujet. Les parents attendent normalement que le collège initie les enfants aux mathématiques, à la physique, aux sciences humaines, aux langues et notamment au français, à tout ce qui fait la substance même des études. Point du tout ! Aujourd’hui ces matières n’ont pas totalement disparu (fort heureusement !), elles sont noyées dans un flot d’activités annexes bien plus attrayantes pour l’enfant parce que plus ludiques et exigeant moins d’efforts. Un élève veut-il s’initier au bridge ? Qu’à cela ne tienne ! Un club de bridge est créé et les enfants peuvent s’y inscrire. Veut-il s’intéresser à l’analyse filmique ? Il en a aussi la possibilité. Désire-t-il suivre un parcours diversifié ? (un thème commun traité par des professeurs de disciplines différentes), des professeurs sont présents pour le guider. Songe-t-il à son avenir ? Des enseignants par le biais du " projet personnel de l’élève " sont là (non préparés d’ailleurs) pour l’entourer, le conseiller, le guider dans telle ou telle direction et prendre éventuellement à sa place des décisions lourdes de conséquences. L’enfant est-il perturbé, comme peut l’être un adolescent ? Aussitôt un professeur de sciences apparaît et l’initie à la sexualité ; il en profite même, s’il s’agit d’une adolescente, pour lui parler de la contraception ou de la pilule du lendemain. Et le SIDA me direz-vous ? Il semble qu’on l’ait oublié ! Vous n’y êtes pas ! Outre l’évocation de la maladie tout au long de l’année, une journée, pas moins, est consacrée à ce qu’on appelle " le Raid Sida ", c’est-à-dire que des enfants quittent leur établissement pour une destination donnée et doivent se repérer seuls dans les rues et ruelles d’une ville pour rencontrer des responsables, capables de répondre à leurs questions. Il n’est pas rare d’ailleurs de trouver le lendemain, jonchant le sol d’une salle de classe quelques préservatifs que des élèves ont laissé traîner et qui donnent lieu à des réflexions égrillardes. L’enfant veut-il faire des échanges avec des étudiants étrangers ? Il lui suffit de s’inscrire au projet " Comenius ". Désire-t-il s’initier à l’écriture théâtrale, à la musique, à la diététique ? C’est encore possible. Tout est possible ! Certains ont même pensé à l’éduquer au triage des déchets... Autre trouvaille délicieuse, à la rentrée 1999, sous l’instigation de Mme Royal, c’est la distribution en début d’année d’un journal pour chaque élève de sixième, journal reconnu par les intéressés eux-mêmes comme " débile " avec des questions du style : " c’est votre premier jour de classe à quelle heure vous êtes-vous levé ? " Ou " si vous étiez un oiseau, quel oiseau aimeriez-vous être ? Un insecte ? une libellule ? un grillon ? un papillon ? ". Ou encore, la création d’études encadrées confiées souvent à des jeunes incompétents qui osent transmettre aux élèves des inexactitudes en mathématiques ou en langues vivantes. Quel gâchis ! Notre éducation nationale, tant admirée autrefois dans le monde entier va très mal. Le navire fissuré prend l’eau de toutes parts et l’on n’arrive pas à colmater les brèches. Les enseignants se lamentent des baisses de niveau et finissent par en rire ou par se révolter. Que dire des élèves de sixième qui ne savent ni lire, ni écrire, ni compter couramment ? Qui ne savent pas faire la distinction entre un substantif et un verbe, un adjectif et un nom ? Que dire des élèves de troisième qui sont incapables de conjuguer correctement un verbe du premier groupe au passé simple, de distinguer un complément d’objet direct d’un sujet inversé ? Que penser d’un élève qui passe d’une classe à l’autre, jusqu’en troisième parce que plus personne ne sait quoi lui proposer ? Le plus simple est évidemment de s’en débarrasser en le poussant vers la sortie. De son avenir on n’en a cure ! Quant à orienter un enfant, cela relève de la quadrature du cercle. Les conseils de classe ne servent pratiquement à rien puisque les professeurs n’ont aucun pouvoir de décision. Par ailleurs, diriger un enfant qui ne possède pas les bases élémentaires du savoir lire et écrire relève du miracle. Les apprentis ont eux aussi besoin de ces bases simples mais solides et du goût du travail bien fait. Or les enfants, depuis leur entrée à l’école n’ont jamais fourni le moindre effort. Tôt ou tard ils sont assurés de continuer leur cursus scolaire même s’ils en sont incapables. Là est l’échec de la nouvelle éducation nationale qui a perdu son objectif principal : apprendre l’effort, la volonté, le courage et le dépassement de soi. Il est évident que ces élèves en perdition, pendant des journées entières assis sur une chaise à écouter des professeurs leur proposer des sujets qui les indiffèrent, se sentent humiliés chaque fois un peu plus par les zéros obtenus et les critiques permanentes dont ils font l’objet. Alors arrive la violence verbale, puis physique, simple d’abord puis plus grave, comme tel élève qui a contraint un de ses camarades à manger des excréments, comme tel autre qui, désireux de se faire de l’argent de poche, a vendu au collège des pistolets à grenailles, comme tel autre enfin qui a donné un coup de poing à son professeur de mathématiques. Ce ne sont pas, à l’évidence, des éducateurs ni des " emplois jeunes " qui feront disparaître cette violence. Il faut pouvoir trouver pour ces jeunes en situation d’échec d’autres structures, capables de les accueillir afin qu’ils puissent s’épanouir et envisager un avenir à la mesure de leurs compétences. Que ceux qui nous gouvernent évitent de jeter de la poudre aux yeux avec des inventions creuses et prétentieuses qui fabriquent de l’illusion. Il serait souhaitable d’abandonner cette école à tronc commun unique sur laquelle beaucoup de non-enseignants se permettent d’agir et de conseiller. La pédagogie est un métier qui ne se réalise pas avec de bons sentiments démagogiques, mais avec une bonne dose d’objectivité, de compétences et d’honnêteté intellectuelle. Tweet |