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L’évaluation des élèves
L’évaluation des élèves
Dans le N° 124 de juin de cette Lettre trimestrielle, nous nous demandions si la Conférence nationale d’évaluation que venait de créer M. Benoît Hamon, alors ministre de l’Education nationale, en lui confiant la mission de réformer l’évaluation des élèves, allait recommander le retour aux bons points que les plus anciens d'entre nous ont connus.
Prenant les choses en main, à sa façon toute en nuances, Mme Vallaud-Belkacem, lors de son intervention, le 15 novembre aux Controverses de Descartes, a déclaré qu’elle s’intéressait au sujet de l’évaluation « parce que l’évaluation des élèves telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui ne repose sur aucun fondement scientifique »[1].
Tant de suffisance, alliée à tant d’ignorance, laisse pantois ! Claude Allègre, s’il vitupérait contre le mammouth, ne mettait pas en cause de cette façon les maîtres. Si pour le ministre le temps consacré par les professeurs à la correction des copies est du temps perdu, tel n’est pas le point de vue des élèves.
Luc Cédelle, journaliste au Monde[2], a publié en 2008, au Seuil, Un Plaisir de collège, fruit de quatre ans d’enquête sur le collège expérimental Clisthène[3], ouvert à Bordeaux en 2002. Ce collège pratique « une pédagogie respectueuse des individus [et] son équipe cherche à ouvrir les pistes d’une école plus efficace, plus active et plus démocratique ». Astrid (p.41) « se montre très attachée à sauvegarder la valeur des notes » et (p.73) « Contrairement à une inclination fréquente chez les pédagogues et en dépit, d’ailleurs, de leur propre sentiment spontané, les enseignants de l’équipe distribuent notes et appréciations. Les élèves y tiennent absolument » !
Avoir de bonnes notes n’est pas forcément de tout repos, dans un univers moins favorable que celui de Clisthène. C’est ainsi que dans La Croix du 24 octobre 2012, Marie Auffret-Péricone explique que les bons élèves ne sont pas toujours des enfants heureux « Car, aujourd’hui, être un bon élève, c’est aussi prendre le risque de se faire traiter d’intello, de fayot, voire de bouffon.
Il est vraisemblable que les recommandations que le Jury de la Conférence nationale sur l’évaluation des élèves doit remettre à Mme Vallaud-Belkacem ne bouleverseront pas l’ordre – ou plutôt le désordre – établi. Elles ne porteront pas sur les causes réelles d’une situation résultant essentiellement de l’hétérogénéité des classes, de la multiplicité des options et du quasi illettrisme d’une proportion non négligeable des élèves de collège et de lycée.
Ces élèves ne souffrent pas tant de leurs mauvaises notes que de leur impuissance à accéder à un savoir, qu’on ne leur demande d’ailleurs pas de détenir pour leur faire franchir les étapes de la scolarité, en vue d’obtenir, en fin de compte, un bac dévalué.
Recteur Armel Pécheul Tweet |