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Lettre N° 32 - LA NOUVELLE CROISADE

Détails
Créé le lundi 1 avril 1991 02:35

 

L’Homme Nouveau, d’une part, Famille Chrétienne, d’autre part, ont publié une lettre ouverte adressée par M. Brunet-Lecomte, membre du C.A. APEL de l’Académie de Versailles, à M. Cerisola, Président de l’UNAPEL, qui nous semble mériter d’être portée à la connaissance de nos adhérents :

"Monsieur le Président,
Pour son prochain Congrès National l’UNAPEL a retenu un thème d’actualité : l’Europe.
L’UNAPEL que vous présidez, regroupe tous les parents de l’Enseignement Catholique, soit près de 810.000 adhérents (c’est la seule association de parents de l’EC). Elle tient un congrès national tous les quatre ans, et donne ainsi à cette manifestation une importance essentielle. Cinq mille parents y sont attendus au mois de mai prochain, à Lille, pour y réfléchir sur les questions suivantes : "Quelle éducation ? Pour quelle Europe ?"
Pour introduire ces journées et pour "éclairer les congressistes" dans leurs réflexions, l’UNAPEL a invité à titre de conférencier inaugural puis d’animateur de la table ronde introductive, Monsieur Jean Delumeau, historien et écrivain bien connu.
Or il se trouve que Jean Delumeau a récemment pris, en tant que rédacteur d’un chapitre du livre "Le Rêve de Compostelle - Vers la restauration d’une Europe chrétienne ?" (Éd. Centurion) des positions très critiques à l’encontre de l’Église et de Jean-Paul II. Ce livre rassemble les textes de plusieurs auteurs dont l’ensemble témoigne de la même agressivité.
Vous trouverez ci-après quelques passages significatifs de Jean Delumeau (chap. 14 du livre cité plus haut).

* Titre du chapitre :
"Les conditions actuelles d’une nouvelle Évangélisation".
* "Les sentiments diffèrent quant au meilleur "modèle" d’Église capable d’affronter une tâche aussi lourde."
* "On sait quel "modèle" ecclésial prévaut actuellement à Rome dans le corps hiérarchique de l’Église catholique : pouvoir absolu du pape ; corps épiscopal totalement docile à Rome ; refus d’imaginer des ministères nouveaux et de faire accéder à la prêtrise des personnes qui en sont jusqu’ici exclues (hommes mariés, femmes) ; suspicion globale à l’égard de la civilisation laïcisée qui nous entoure ; retour à l’esprit et aux méthodes de l’Église tridentine..."
* "Le système de gouvernement plus que jamais en vigueur actuellement dans la confession romaine est profondément désaccordé par rapport aux besoins psychologiques de l’homme d’aujourd’hui. Le pouvoir absolu d’un pape élu à vie, le manque de concertation entre lui et les évêques locaux pour les nominations épiscopales, l’absence quasi complète de dialogue (malgré des affirmations en sens contraire qui ne trompent personne) entre la hiérarchie et les fidèles sur les problèmes qui les concernent de très près..."
Faut-il souligner aussi les attaques quasi personnelles dont font l’objet Jean-Paul II et le cardinal Lustiger dans cet ouvrage ? L’ensemble du livre dont Jean Delumeau est solidaire vise surtout à dénigrer la conception que se fait le pape de l’identité européenne. Notons qu’un chapitre intitulé : "Les séminaristes du cardinal Lustiger" consiste à dénoncer les choix théologiques et pastoraux du cardinal. L’UNAPEL ayant le monopole de la représentation des parents de l’Enseignement Catholique, il est attristant, pour des parents, de se sentir prisonniers d’une politique qui contredit de façon claire le fond même du Magistère de l’Église. Comment, vous-même et le Bureau national, avez pu prendre une telle décision ?
Notre réflexion éducative va-t-elle être conduite sous l’éclairage de démarches idéologiques en telle opposition avec l’Église ?
"Quelle éducation ? Pour quelle Europe ?". Ce que nous dit Jean-Paul II provient-il d’un rêve qu’il aurait eu sous le ciel de Compostelle ?
Les pratiques romaines, à en croire Jean Delumeau sont-elles profondément désaccordées par rapport aux besoins psychologiques de l’homme d’aujourd’hui ?
Je vous demande de bien vouloir faire ce qui est en votre pouvoir pour remettre à un second plan ou annuler cette invitation faite à Jean Delumeau.
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments les meilleurs."

A vrai dire, ce texte, exemplaire par son courage et sa lucidité aura eu quelques effets, car, vraisemblablement pour éviter ce type de reproche, l’intervention de mon éminent collègue, le Professeur Delumeau, et le Congrès de l’UNAPEL plus généralement ont sombré dans l’insignifiant et le soporifique, si j’en crois ma meilleure source d’information, le remarquable article de Josyane Marquier dans l’Homme Nouveau du 2 juin 1991.

Je voudrais poser deux questions :

1. Est-il dans la fonction de l’UNAPEL de défendre une certaine conception de l’Europe, celle de M. Delors et des technocrates de Bruxelles, l’Europe supra-nationale qui se distingue radicalement de l’Europe des patries qui a les faveurs d’autres secteurs de l’opinion ? Le choix entre ces deux conceptions relève d’un débat strictement politique. Néanmoins, l’UNAPEL a cru bon de n’inviter au Congrès de Lille que des hommes politiques qui faisaient l’apologie de l’Europe supra-nationale.

Lorsque je lis des extraits du discours de M. Jacques Barrot : "l’Europe balaiera les corporatismes, les obstacles... l’Enseignement catholique, parce qu’il a l’audace d’anticiper sur les grandes perspectives européennes, démontrera qu’il est exemplaire, qu’il est à l’avant-garde de l’expérience éducative, etc...", je suis évidemment très reconnaissant à la journaliste qui a eu la force de garder oreilles et yeux ouverts, mais aussi très inquiet sur la confusion des genres. L’UNAPEL n’est-elle qu’une sorte d’appendice du C.D.S. ou de la France unie ?

Malgré son entière bonne foi, qui n’est aucunement en cause, M. Barrot ne pouvait qu’échouer dans son entreprise qui consistait à montrer que le "supplément d’âme" se trouvait du côté de l’Europe de Bruxelles !

Non, vraiment, ce n’est pas sérieux, et je ne vois pas en quoi l’évangélisation est concernée par des affaires qui relèvent de la "politique politicienne". Sans quelques discours épiscopaux, notamment celui de Mgr Panafieu, qui oppose à l’Europe des "poings fermés" celle des "mains tendues", il n’y aurait vraiment rien eu de positif dans ce Congrès de l’UNAPEL.

2. Mais il y a pire. Passons sur ce que comporte de confusion cette identification de l’ouverture à l’autre avec l’esprit anti-national. Il reste que le thème de ce congrès, la façon dont il devait se dérouler, s’insérait un peu trop bien dans une vaste opération dont la rigueur de son organisation nous donnerait à penser que le K.G.B. n’est pas tout à fait mort et que l’UNAPEL a été vraisemblablement utilisée à son insu. Quant au but de l’opération, il est manifeste : c’est la croisade anti-Jean-Paul II.

Car personne ne peut maintenant en douter. Il s’agit bien d’abattre un Pape qui a pour défaut essentiel de défendre le dogme catholique sans compromission, de s’efforcer de convertir, ce qui est réprouvé au nom d’une conception perverse de la liberté de conscience, enfin et surtout d’avoir contribué de façon décisive à libérer les victimes de l’oppression communiste. Il est loin le temps où l’on s’extasiait sur ce premier pape non italien depuis quatre siècles, ce pape "venu de l’Est", "venu du froid", issu de "l’Eglise du silence". Dès lors qu’on a compris qu’il ne tenait pas l’installation des sex-shops ou des "Mac Donald", la diffusion des vidéos série X pour indispensables au progrès de la civilisation et de la liberté, qu’il préservait sur des sujets sensibles, comme l’avortement, la doctrine traditionnelle dont le dépôt lui était confié, ce Pape fut tout juste bon à être jeté aux orties. Ce n’était qu’un Polack abruti, ignorant de la modernité ! Et lorsqu’il persévère, tout est mis en œuvre pour l’empêcher de nuire, jusqu’à l’attentat contre sa vie dont la récidive n’est pas totalement à exclure.

Mais il y a aussi et surtout les armes "morales", si j’ose dire : les ignominies de certains périodiques, à côté desquels la Calotte fait figure de publication de la Bibliothèque Rose. Mais aussi, et c’est plus grave puisqu’il s’agit d’un personnage officiel, les déclarations de Mme Véronique Neiertz, secrétaire d’Etat récemment nommée aux "Droits des femmes" (sic), déclarations dans lesquelles l’ignoble le dispute au ridicule : on apprend que par sa condamnation de l’avortement le Pape "insulte" les femmes "dans leur dignité, leur courage et leur détresse". Je suis bien aise d’apprendre que "les femmes n’ont de leçon à recevoir de personne en ce qui concerne les responsabilités de la vie ou le sens des responsabilités familiales". Si j’ai bien compris, pauvre représentant du sexe autrefois dit fort, je ne suis pas jugé capable d’accéder à ce niveau d’autonomie.

Mais à côté de ces outrages caractérisés qui ne peuvent qu’écœurer le moins papiste des Français, qu’il soit catholique ou qu’il ne le soit pas, pourvu qu’il soit de bonne foi, il y a les piqûres d’insectes, les petites critiques permanentes dont l’accumulation finit par nous échauffer les oreilles.

J’en donnerai un exemple. Alors que je venais d’achever la lecture de la très remarquable encyclique Centesimus Annus, le hasard a voulu que j’ouvre dans une librairie un exemplaire de l’édition de ce texte publié aux éditions du Cerf. Je suis tombé, non sans étonnement, sur la préface que le Père Puel, "dominicain et maître de conférences à l’Université de Lyon II" - ainsi est-il présenté par son éditeur - a cru nécessaire d’ajouter au texte pontifical.

Je suis proprement scandalisé par l’insolence du ton condescendant qu’adopte ce religieux pour commenter un écrit du Pape. Ainsi apprend-on (p. XXV) que sur le marxisme "le point de vue du Pape est juste mais partiel" - notons, au passage, le qualificatif "juste" au lieu où on attend "vrai", caractéristique du style communiste comme le savent tous ceux qui ont fréquenté les écrits marxistes - et un peu plus loin, au sujet des passages relatifs à l’athéisme, on dit que le point de vue de Jean-Paul II est "incomplet" (p. XXVI).

Ce style "grand seigneur" est proprement insupportable. Je cite de mémoire, car naturellement je n’ai pas fait acquisition de cette édition. Je rappellerai au Père Puel que personne n’oblige un homme à se faire religieux, mais qu’aussi longtemps qu’il reste ecclésiastique, on attend de lui un peu de retenue lorsqu’il commente un texte du Souverain Pontife. J’ajouterai pour mes lecteurs que Pierre Tequi, éditeur, 82 rue Bonaparte, 75005 Paris, publie l’encyclique sans une préface que les talents pédagogiques du Saint-Père, qui a exercé les fonctions d’enseignant (faut-il le rappeler ?) rendent d’ailleurs parfaitement inutile.

J’ai voulu donner quelques exemples, qui vont du monstrueux au dérisoire, pour illustrer l’offensive qui vise, à travers le Souverain Pontife, l’Église catholique dans son ensemble et même, plus généralement, la chrétienté. Sans aucun doute, certains y participent sans être conscients de ce qu’ils font. Mais que l’UNAPEL, en raison de la réputation de son principal invité, ait pu se trouver embrigadée, à titre d’auxiliaire subalterne, vraisemblablement contre son gré et par légèreté, dans une vaste opération anti-Pape, cela est proprement affligeant.

On me dira probablement que je me mêle de ce qui ne me regarde pas, que je ne suis pas membre de l’UNAPEL, ni ancien élève de l’enseignement catholique, etc... Je répondrai que, dès lors qu’on a une action publique, on s’expose au jugement de tout le public.

En d’autres termes, ceux qui attendent que je me taise seront déçus.

Maurice BOUDOT

 


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