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Lettre N° 31 - LES INQUIÉTUDES DE L’ÉCOLE LIBRE (suite)
Dans notre numéro de septembre, nous avons fait écho aux plaintes tout à fait justifiées de l’école libre 1 enfermée depuis 1985, par les soins de M. Chevènement, dans la cadre de la loi Debré de 1959. Les protestations de la victime ont d’ailleurs conduit le bourreau à desserrer quelque peu la corde avec laquelle il l’étrangle : le forfait d’externat a été réévalué et des mesures concernant la titularisation et la rémunération de certains maîtres pourraient entrer en application prochainement. Ces difficultés étaient prévisibles, même si elles étaient niées alors par des responsables de l’enseignement catholique 2 . Quoi qu’il en soit du passé, les élections cantonales, unique rendez-vous prévu avec les électeurs en 1991, ayant été prudemment repoussées en 1992, le petit jeu du chat et de la souris continuera encore vraisemblablement pendant quelque temps. Il faut, naturellement, faire pression sur les pouvoirs publics pour que soit respectée la liberté de choix de l’école. 3 Mais, à plus long terme, la survie et le développement de l’école libre dépendent plus d’elle-même que de ses adversaires. Nous souhaitons que les observations, forcément incomplètes, présentées ici contribuent à sa nécessaire rénovation. L’ETAT DES FORCES Pour assurer sa mission, toute école a besoin (nous l’avons suffisamment entendu crier dans la rue récemment) de maîtres et de murs. L’école libre est placée, sur ces deux plans, dans des conditions difficiles. ·Pour les maîtres parce que ceux qui se destinent à l’enseignement public sont rémunérés pendant leur période de formation alors que ceux qui se destinent à l’enseignement privé ne le sont pas. Cette situation inique a évidemment l’avantage de permettre l’accomplissement de vocations héroïques mais l’on peut douter qu’elles soient en nombre suffisant. S’il convient, comme le fait l’enseignement catholique, de demander réparation de cette injustice, il conviendrait que l’enseignement catholique recherchât les moyens de se sauver lui-même. C’est ainsi que pourrait être créé un fonds finançant des bourses pour ceux qui se destinent à l’enseignement libre. De même il pourrait être fait appel aux bonnes volontés, qui ne manqueraient pas, de pré-retraités et d’autres personnes dépourvues d’emploi pour soulager les maîtres d’une partie de leur tâche ou assurer des enseignements. La mise en œuvre de telles idées peut présenter des difficultés mais les résoudre est une affaire de volonté. Cette volonté existe-t-elle ? Faiblement, à en juger par ce qui a été fait pour le financement des constructions. ·Pour les murs, alors que le budget de l’UNAPEL adopté le 11 mai 1986 prévoyait la somme symbolique d’un million de francs pour la participation au financement de la construction d’écoles, ce n’est qu’en 1989 qu’a été diffusé par l’Association d’entraide des établissements privés d’enseignement catholique un appel de fonds auprès du public dont ni l’ampleur ni les résultats n’ont été, à notre connaissance, publiés. Le secrétariat général de l’enseignement catholique vient de lancer à son tour l’Opération Avenir pour construire 100 lycées en 10 ans. Les permanents dévoués qui conduisent la seconde opération ne semblent pas plus ardents que les amateurs distingués qui présidèrent à la première. On pourrait soupçonner les responsables de l’enseignement catholique de n’avoir pas su prévoir les besoins en locaux. Mais cela reviendrait à dire qu’ils ne savaient pas que tes zones rurales se dépeuplaient au profit des agglomérations urbaines et qu’ils n’avaient pas remarqué, dans les années 60 et 70, les constructions réalisées dans l’enseignement public. Si l’enseignement catholique n’a pas su au cours de ces trente dernières années faire appel à ceux, très nombreux, particulièrement parmi ses anciens élèves et parmi les parents d’élèves qui étaient prêts à le soutenir, c’est parce qu’il ne l’a pas voulu. Il ne l’a pas voulu par souci de ménager les pouvoirs en place 4 et pour ne pas avoir à rendre des comptes à ceux qui auraient répondu à ses appels. Sur ce dernier aspect son attitude fait penser à celle de certains dirigeants de groupes industriels ou financiers qui, toutes tendances politiques confondues, préfèrent avoir à faire à l’Etat actionnaire unique plutôt qu’à une multitude d’actionnaires privés. S’ajoute à cela, depuis 1981, dans le cas de l’école comme dans celui de l’entreprise, la préférence de certains pour les solutions collectivistes. Le débat auquel donne lieu actuellement le "projet éducatif" de l’école catholique peut-il s’expliquer de la même façon ? LE PROJET EDUCATIF Au cours des dernières décennies, les écoles catholiques se sont dotées d’un "projet éducatif" présentant la façon dont chaque école conçoit sa mission éducative et entend l’accomplir. Si l’on décèle dans certains de ces projets un effort d’originalité, ils n’en ont pas moins des traits communs. Ils ont aussi une aspiration commune liée à leur caractère chrétien. Plus récemment, l’idée d’un "projet éducatif de l’enseignement catholique" a été avancé par certains. Un dossier publié dans le numéro de mars 1989 d’Enseignement Catholique Documents et intitulé "le projet éducatif de l’enseignement catholique" a fait l’objet, un an plus tard, de deux articles publiés dans Famille Chrétienne. Sébastien Larissa, auteur de ces articles, relevait des expressions du projet telles que "l’école catholique n’est pas d’abord chercheuse de Dieu mais elle est d’abord chercheuse de l’homme" et critiquait l’esprit général du texte consistant, à partir d’un constat de la déchristianisation de notre pays, à dire qu’il n’existe qu’une alternative dont les deux termes sont l’enfermement dans un ghetto ou le renoncement à l’enseignement de la foi. Ces articles créèrent un certain émoi dans les milieux concernés et, au lieu d’être enfouis dans le silence comme il est fréquent dans de telles circonstances, furent à l’origine d’une table ronde organisée par Famille Chrétienne avec le Père Max Cloupet, Secrétaire Général de l’Enseignement Catholique, un directeur d’école libre et un responsable de parents d’élèves. Nous avons renoncé à citer des phrases du compte rendu publié dans le numéro du 13 septembre de cet hebdomadaire car, reflet sans doute d’une situation commençant à évoluer, la pensée des participants semble s’y présenter à travers un kaléidoscope. 5 Notons cependant que le Père Cloupet a précisé que le texte incriminé n’était pas le projet éducatif de l’Enseignement Catholique et que c’était à la suite d’une erreur typographique qu’il avait été présenté ainsi. 6 Enseignement Catholique Documents a publié depuis dans son numéro d’octobre, sous le titre "Identité de l’Enseignement Catholique" et sous la forme d’un lexique, des extraits des principales interventions de Mgr Bernard Panafieu, archevêque d’Aix-en-Provence et président de la Commission épiscopale du monde scolaire et universitaire. LA CROISEE DES CHEMINS Le texte d’introduction du dossier "Identité de l’enseignement catholique" exprime la volonté "d’apporter notre pierre originale au Service national de l’éducation et non pas de nous replier sur nos sécurités ou nos bastilles". On remarque que dans ce texte le terme national a été substitué pour le Service de l’éducation au terme public habituellement utilisé dans l’école catholique. Ce changement nous paraît heureux dans la mesure où l’on pouvait ressentir dans l’expression précédente comme un début d’acceptation du Service public unifié et laïc que nous proposait M. Savary il y a quelques années. Il est vraisemblable que le ministre de l’Education nationale continuera à ignorer la main tendue de l’école catholique pour le service national comme il l’a ignorée pour le service public. D’ailleurs, agir autrement n’entraînerait-il pas de sérieuses perturbations dans le "courant Jospin" au sein du parti socialiste ? 7 A quoi sert-il par conséquent de persévérer dans cette voie ? Sans chercher nullement à violer les consciences des enfants que leurs parents lui confient ni à entrer en guerre avec le gouvernement, il est grand temps que l’école catholique affirme sa finalité et sa personnalité, exige de ceux qui ne partagent pas sa foi le respect de son enseignement religieux et de sa liturgie, du gouvernement la parité avec l’école publique, l’une et l’autre écoles étant financées par l’impôt. Dans une lettre aux parents, le directeur d’un grand collège écrit : "Pour s’être imprudemment et systématiquement mis à la remorque de ce navire avarié (l’Education Nationale), l’Enseignement Catholique découvre à son tour les risques d’asphyxie et de paralysie. Empêtré dans une loi d’il y a plus d’un tiers de siècle, tenu pour parent pauvre, sans même un strapontin dans les lieux décisionnels, il se voit aujourd’hui conduit à protester et réagir avec vigueur". Imprudence n’est pas vice et ceux qui ont été responsables de l’Enseignement Catholique ces trente dernières années ont droit, pour l’avoir maintenu, à la reconnaissance de ceux qui y sont attachés. Ils y auront doublement droit s’ils admettent maintenant, comme certains commencent à le faire, une insuffisance de rigueur dans l’affirmation du caractère propre et un excès de confiance en une évolution favorable du clan laïque. 8 Les "consommateurs d’école libre" ne doivent plus servir de prétexte à l’affadissement des nourritures qu’elle propose. De leur côté, les parents, qui ne sont pas simplement des "partenaires de la communauté éducative" mais les premiers responsables de l’éducation de leurs enfants, doivent assumer leurs responsabilités mieux qu’ils ne le font aujourd’hui. L’UNAPEL, leur union nationale, devra pour cela abandonner le centralisme démocratique qu’elle est, depuis les événements survenus à l’Est, l’une des dernières à pratiquer. Il faut espérer que son président, Alain CERISOLA, aura le courage de le faire, tout comme il a eu celui d’écrire dans "la famille éducatrice" de janvier "Dire et répéter que l’objectif du système éducatif est d’emmener 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat est une erreur". P. J. C. 1 Un lecteur nous a fait observer que nous cantonnions notre propos à l'école catholique alors que l'école libre ou école privée compte également des établissements protestants, juifs et musulmans ainsi que des établissements laïques.
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