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Lettre N° 26 - L’ÉCOLE MULTICULTURELLE
Essayez de vous souvenir de ce qu’on nous racontait lorsque a éclaté l’affaire des foulards islamiques ! Ce sont des souvenirs déjà anciens : il faut remonter au début d’octobre, soit deux mois en arrière. La moitié d’un continent trouve le temps de réduire à l’humiliation les régimes communistes qui lui avaient été imposés par l’occupation étrangère, tandis que notre gouvernement (démocratiquement choisi) est incapable de résoudre un problème apparemment limité. Il aurait fallu avoir bien mauvais esprit pour trouver à redire au port du foulard islamique alors qu’on rencontrait dans les universités des étudiants portant soutane (et j’ajouterai pour les curieux des robes de moines bouddhiques dans l’U.E.R. où j’enseigne). Grossier sophisme : on ne peut confondre une Université dont les étudiants sont presque tous des adultes, parmi lesquels des étrangers qui (en principe) ne feront en France qu’un séjour limité, avec des lycées ou collèges, voire des écoles primaires, dont les publics sont constitués d’adolescents ou même d’enfants dont on nous chante à qui mieux-mieux qu’il faut les intégrer, et qui, s’ils ne sont pas déjà Français (ou présumés tels), sont souvent destinés à le devenir automatiquement par la grâce d’un code de la Nationalité passoire. Mais pourquoi en faire un drame ? Après tout, ce foulard n’était-il pas une simple mode vestimentaire, somme toute fort correcte ? Et le Cardinal-primat disait préférer le tchador à la minijupe, ou autre marque de "dévergondage". Noble langage, dont il faut simplement regretter qu’il n’ait pas été tenu beaucoup plus tôt. Faudrait-il croire que certains comptent se glisser comme passager clandestin dans les fourgons de l’Islam ? L’archevêque de Paris, plus prudemment, allait consulter le Recteur de la Grande Mosquée sur la signification de ce voile, ou foulard, etc. Et on eut droit à un débat portant sur la théologie musulmane (avec développements relevant de la linguistique). Que de feinte naïveté, car la signification du "message" était très claire. Fallait-il toutefois monter en épingle un incident très localisé ? Trois élèves dans un collège dont le Principal serait un peu trop rigoriste ; la seule solution aurait été de n’y prêter aucune attention. Après l’interprétation dissimulatrice, c’est le fait lui-même qu’on essaye de minimiser, faute de pouvoir le nier, et c’est ici que va éclater l’impudence du mensonge. Dès le début de novembre, M. Jospin doit reconnaître qu’il y a d’autres cas : il en avoue 10 répartis sur 7 établissements, alors qu’il vient d’inviter à sa table plus de sept chefs d’établissements concernés. Et on apprend que la mode vestimentaire n’affecte pas seulement les élèves, mais aussi les enseignants. On découvre des institutrices voilées. D’ailleurs, il ne s’agit pas seulement d’une mode vestimentaire. Ici on refuse de suivre certains cours, ailleurs on rejette la mixité, ou on exige à la cantine des menus spéciaux (viande Hallal). Les musulmans ne sont pas seuls concernés, mêmes s’ils sont les plus bruyants. Ici les israélites orthodoxes ont leurs exigences au sujet de l’emploi du temps, là les témoins de Jéhovah leurs fantaisies en matière de dessin ! Et, bien entendu, avec l’accord tacite des autorités ministérielles, peut-être même sur leur conseil, on a cédé à ces demandes dans un bon nombre de cas. La société multiculturelle (qu’on tient à nous faire confondre avec la société multiraciale), la voilà ! Il n’y a pas de raison pour que l’escalade s’arrête : on en est pour l’instant aux menaces de mort, aux insultes ordurières, aux plaintes judiciaires contre principaux et professeurs récalcitrants. Je veux bien croire qu’il y ait eu une recrudescence cette année. Mais, enfin, tous ces phénomènes ne sont pas très récents : on ne réaménage pas en une semaine ou deux les menus d’une cantine. C’est dire qu’on a longtemps dissimulé un certain nombre d’incidents. Depuis combien de temps cache-t-on la vérité ? Nous serions curieux d’avoir une réponse précise (en un sens, tout dérive du laxisme post-68). Bien entendu, personne ne nous fera croire que M. Jospin ignorait tout. Sinon, à quoi lui serviraient son corps d’inspection, ses administrateurs locaux ? Le patron de la F.E.N. (dont les positions actuelles me semblent pour l’essentiel très estimables) a dû, lui aussi, être assez bien informé avant le commun des mortels. Alors, pourquoi le Ministre s’est-il tu, et pourquoi a-t-il dû recommander le silence autour de lui ? Pourquoi un tel acharnement à dissimuler l’ampleur du phénomène ? La réponse est évidente : on craignait que M. Le Pen qui demandait aux Français "d’ouvrir les yeux" n’en tire profit ! On a essayé de mettre un tchador bien épais sur la tête de tous les électeurs. On sait le résultat. Moralité, car il y en a toujours une, même pour les grands ministres : l’atermoiement est la pire des stratégies, le mensonge (ou la dissimulation qui revient au même) est toujours puni, celui qui s’acharne à mentir se fait toujours prendre. Le temps de l’expiation a donc commencé. Il y a quelque temps, cinq de mes collègues dont je respecte le courage sans nécessairement partager toutes les idées (ou toutes les illusions) parlaient très judicieusement d’un Munich de la laïcité. A voir M. Rocard, après l’arrêt du Conseil d’État, lancer devant les caméras de télévision un appel larmoyant à la "foi laïque" des enseignants, son dernier rempart, leur demander de faire preuve d’une fermeté dont il ne donne guère l’exemple, alors qu’il devrait savoir que le maintien de la paix civile, dont la neutralité des écoles publiques est une condition, relève de la fonction de souveraineté de l’État, on en vient à penser à un autre événement dont j’ai été témoin tout enfant : la débâcle de 1940. Décidément, l’histoire va très vite en ce moment. le 30 novembre 1989
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