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Lettre N° 54 - 4ème trimestre 1996
RÉUNION DU 9 NOVEMBRE 1996 Comme en 1990, en 1992 et en 1994, la remise des prix et l’assemblée générale d’Enseignement et Liberté se sont tenues au palais du Luxembourg le 9 novembre. Nous donnons dans ce numéro le rapport moral du Président, le rapport financier, leur discussion et les résolutions votées en assemblée générale ainsi que la présentation des ouvrages couronnés par M. Jean Cazeneuve, président du jury, et les réponses des lauréats. Nous publierons, dans le courant du premier semestre 1997, tes actes du colloque que nous avions organisé le même jour avec l’OIDEL et le centre Luigi Einaudi. Conformément à ce qui est devenu depuis 1990 une véritable tradition, nous allons tenir au palais du Luxembourg une assemblée générale de notre association. Elle nous donnera l’occasion de procéder à la remise aux lauréats des prix d’Enseignement et Liberté), décernés par un jury présidé par M. Cazeneuve. Je tiens à exprimer à la Présidence du Sénat toute notre reconnaissance pour la sollicitude qu’elle nous marque et le grand honneur qu’elle nous fait en mettant à notre disposition les locaux où nous allons passer toute la journée. Car juste après l’assemblée générale s’ouvrira la journée d’études sur le financement de l’éducation, organisée en collaboration avec l’O.I.D.E.L. (Organisation Internationale pour le Développement de la Liberté d’Enseignement), notre association et le centre Luigi Einaudi. Cette journée, nous en avions formulé le projet il y a deux ans, dans notre rapport moral, et vous aviez bien voulu adopter une résolution en faveur de son organisation. Elle devrait nous permettre de confronter la situation française avec celle de pays voisins qui connaissent sans doute des difficultés assez analogues à celles que nous rencontrons, mais qui ont peut-être manifesté plus d’inventivité et plus d’audace que nous, pour explorer des pistes nouvelles afin de résoudre le problème du financement de l’enseignement privé. J’espère que nous tirerons profit des leçons de ces expériences. Au moins sortirons-nous un peu de la grisaille qui caractérise le paysage éducatif français. Il y a deux ans, j’étais obligé de constater qu’en ce qui concerne la liberté de l’enseignement ou le fonctionnement du service public, la situation avait très peu évolué dans les deux dernières années, et que les changements n’étaient certainement pas dans le sens favorable. Si je dois faire aujourd’hui le même constat, ce n’est pas marque de pessimisme, mais simplement l’évidence des faits qui m’impose cette conclusion. La différence, c’est que lors de notre dernière assemblée générale, nous étions encore à six mois de l’élection présidentielle, maintenant elle est assez loin derrière nous. M. Bayrou est ministre de l’Education nationale depuis plus de trois ans et demi, ce qui constitue presque un record dans un poste qui n’est pas réputé pour assurer la longévité de ses titulaires. Si, sous la cohabitation, on pouvait supposer que M. Bayrou était contraint à la prudence, d’autant plus que l’initiative courageuse qu’il avait prise en proposant l’abrogation de la loi Falloux lui avait valu le camouflet du veto du Conseil constitutionnel et l’avait obligé à se faire oublier, en revanche sous le nouveau septennat, qui prétendait innover en matière d’éducation, on pouvait espérer que sa politique serait très différente. Il n’en a rien été : le ministre de M. Juppé est absolument identique à celui de M. Balladur, aussi prudent que lui, aussi soucieux d’éviter les vagues. Juste avant l’élection présidentielle, M. Bayrou avait obtenu une rentrée 94 calme. En même temps, il maintenait une position de principe ferme sur certains problèmes - comme l’existence d’un baccalauréat, examen national anonyme - malgré la pression à laquelle le soumettaient les médias, mais en refusant de prendre ses responsabilités et de recourir à des mesures radicales quand elles s’imposaient. Ainsi, il ne déposera aucune loi nouvelle relative aux affaires de "foulard islamique" alors qu’elles étaient manifestement nécessaires dès l’époque, tout en rappelant sa désapprobation. Le nouveau Contrat pour l’école publié à l’époque est un véritable dictionnaire des idées reçues, un bréviaire des déclarations d’intention vide de toute signification. Bien entendu, ce type d’opération qui n’intéresse que les journalistes et la direction de la communication au ministère sera réitéré avec les états généraux de l’enseignement supérieur, qui datent du printemps dernier, et qui à l’automne ont tellement perdu de leur fraîcheur qu’ils ont presque disparu dans l’oubli. D’ailleurs, on n’a jamais été autant abreuvé de rapports, de commissions, qui méditent, travaillent et rédigent pour n’aboutir nulle part que depuis le règne de M. Bayrou. Le rapport Fauroux est un modèle en la matière. Depuis, nous sommes envahis par une marée de déclarations d’intention et de réformettes qui n’ont d’autre effet que de semer le désordre. En revanche, notre ministre a mis en œuvre tous ses talents manœuvriers, qui sont remarquables, pour enterrer en douceur le projet de référendum sur l’école qui figurait au programme du candidat-président Chirac. Ici, on n’a jamais manifesté un enthousiasme particulier pour ce projet. On avait signalé que le texte à soumettre au verdict populaire était difficile à mettre au point. Il était toutefois possible de concevoir qu’une espèce de loi programme, d’abord examinée par le Parlement, soit dans un deuxième temps soumise au référendum. Un premier avantage tient à ce qu’ainsi on contournait tous les obstacles tant institutionnels que corporatistes. Ensuite on donnait de la solennité à ce texte, car M. Bayrou sait très bien que les Français sont blasés et sceptiques devant tous les textes législatifs qui émanent du Parlement. Dans son dernier livre de réflexion il insiste précisément sur leur profonde défiance à l’égard de ce qui vient du monde politique. Peut-être un texte qu’ils auraient voté eux-mêmes aurait-il un peu mieux accroché leur intérêt ; du moins peut-on l’espérer. Ces raisons ne semblent pas avoir été prises en considération par un ministre qui appartient à une famille politique qui déteste les questions nettes auxquelles on répond par "oui" ou "non". D’ailleurs, il n’avait jamais dissimulé son hostilité au référendum. L’erreur fut de le nommer au poste qui est encore le sien aujourd’hui. Il a suffi que l’agitation se développe à l’automne 95 - il est bizarre de constater que ces désordres suivent toujours les élections et ne les précèdent jamais ! - pour qu’on ait un prétexte d’ajourner un référendum qui aurait pu conduire à des décisions tranchées. Et M. Bayrou manifesta un réel talent de négociateur pour calmer ta situation, avec quelques crédits, sans que rien d’essentiel soit modifié. Ainsi, le référendum qui dès l’automne semblait en difficulté fut progressivement oublié sous la pression d’une actualité sans cohérence. Aujourd’hui, il ne reste plus que quelques intellectuels regroupés en divers groupes de pression (sans allégeance au président de la République) pour évoquer le référendum, quand ils n’ont rien d’autre à proposer. Il est pourtant manifeste que l’état de l’opinion est tel qu’une réponse négative est probable quel que soit l’objet d’une consultation. Il n’y a pas lieu de s’étonner si la situation ne s’est aucunement améliorée. Les mêmes problèmes resurgissent sans cesse : inadaptation de l’enseignement dans des collèges où on engouffre des élèves sans formation, résultats déplorables du cycle primaire, absence d’une formation professionnelle efficace, blocage sur des problèmes lancinants relatifs à l’enseignement privé auquel on refuse d’accorder une véritable égalité. Et ceux qui vont se plaindre au ministère s’entendent dire que le ministre doit "avancer à petit pas", "par prudence". Bref rien d’encourageant. Bien au contraire, force est de constater que M. Bayrou s’appuie de plus en plus sur les organisations de gauche. Par exemple, c’est le syndicat étudiant U.N.E.F.-I.D. qui soutient ses projets relatifs aux I.U.T. Quant à la violence en milieu scolaire, elle n’a aucunement quitté le devant de la scène. Au début de l’année, le ministre a pris prétexte d’un grave accident dans la périphérie des établissements scolaires pour intervenir, de sorte que le dernier mot ne soit pas laissé à un homme politique d’opposition : avec une mise en scène appuyée, il a invité tous les élèves à réfléchir le même jour au problème. Personne n’est en mesure d’apprécier l’effet de ces débats. Mais il est douteux que le phénomène ait disparu. Comme le constatait sur une chaîne de télévision, avec fatalisme, le proviseur adjoint d’un lycée de Montereau, rien ne changera puisque la législation oblige l’éducation nationale à scolariser les élèves jusqu’à seize ans, aussi violent que soit leur comportement. Le plus extraordinaire est que sa résignation était si profonde qu’elle en oubliait de demander un changement législatif. Décidément, les Français n’écoutent plus leurs hommes politiques parce qu’ils n’attendent plus rien d’eux. C’est parce que nous pensons qu’il y a néanmoins des chemins pour nous faire sortir de cette crise, qui est autant morale et politique qu’économique, que nous allons dans le colloque qui va suivre maintenant nous tourner vers les initiatives qu’ont pu expérimenter les pays voisins. Deux exercices se sont écoulés depuis notre précédente assemblée du 14 novembre 1994. En 1994, les recettes ont été de 629 000 F dont 49 000 F de produits financiers et les charges de 810 000 F, dont 151 000 F pour les prix et la tenue de l’assemblée générale. Le résultat de l’exercice est de -181 000 F. En 1995, les recettes ont été de 514 00 F dont 55 000 F de produits financiers et les charges de 668 000 F. Le résultat de l’exercice est de -154 000 F. Au 31 décembre 1995, les réserves s’élevaient à 856 000 F. Les pertes des deux derniers exercices, les premiers à être significativement déficitaires depuis la création de notre association, s’expliquent par la conjonction de trois facteurs : le vieillissement du fichier qui date, pour l’essentiel, des années 83-84, le maintien depuis cette époque de la cotisation minimum au niveau inchangé de 30 F et celui de l’abonnement à la Lettre trimestrielle à 20 F, la fin des années en or des SICAV monétaires. Si nous n’avons aucune emprise sur l’évolution des marchés financiers, notre conseil a décidé, suivant en cela une proposition faite ici même il y a deux ans, de porter l’abonnement à 50 F et la cotisation minimum au même montant en demandant à ceux qui donnent plus de continuer à le faire, dans le même rapport. Cette décision a été bien acceptée puisque, à fin août, le nombre de cotisations est en hausse de 3 % sur la période correspondante de 1995 et les recettes de 29 %, avec un versement moyen de 190 F contre 152 F, en hausse de 25 %. En ce qui concerne le renouvellement du fichier, les techniques de publipostage, que nous avons utilisées avec succès dans le passé, ne peuvent pas prévaloir sur les sérieux efforts des responsables de l’Education nationale et de l’enseignement catholique pour endormir l’opinion afin de décider du bonheur de tous entre spécialistes. Nous continuons cependant à rechercher et à saisir les occasions qui se présentent, soit d’échanges de fichiers, soit lors de manifestations telles que celle d’aujourd’hui. Mais, dans les circonstances actuelles, la recherche de nouveaux adhérents par ceux qui le sont déjà, parmi leurs relations, reste la méthode la plus efficace. Restent enfin les économies que nous pouvons réaliser. Le conseil a estimé que, dans la mesure où les réserves le permettent, il n’était pas souhaitable qu’elles soient réalisées au détriment de l’activité. En revanche, nous avons cherché à en réaliser par des opérations menées en commun. La manifestation d’aujourd’hui en est un premier exemple puisque, avec l’OIDEL qui a obtenu une contribution de la commission européenne et avec le centre Luigi Einaudi, nous avons pu lui donner une plus grande ampleur que les précédentes pour un coût moindre. Nous ne renonçons pas enfin, même si les tentatives déjà faites nous ont montré que c’était difficile, à trouver des économies avec des associations poursuivant les mêmes buts que nous, en regroupant nos publications ou la gestion de nos fichiers. DISCUSSION L’ajustement de la cotisation base et du montant de l’abonnement, qui avait été proposé par un membre de l’assemblée en 1994, a été effectué en 1995. Si l’augmentation a été comprise par les adhérents et bien acceptée, comme l’indique le rapport financier, il paraît préférable à l’avenir de procéder à des augmentations modérées, reflétant l’évolution du coût de la vie, à un rythme plus fréquent. Le président s’est proposé de soumettre au conseil d’administration une révision du barème pour l’année 1998, celui de 1997 restant inchangé par rapport à 1996. D’autres questions ont porté sur le nombre d’adhérents et sur leur répartition en fonction de leurs liens avec l’enseignement. En 1995, le nombre d’adhérents et/ou d’abonnés payants s’est élevé à 2838. Ce nombre correspond à un fichier actif de 5141 personnes, si l’on tient compte de ceux qui ont effectué au moins un versement lors de l’un des quatre derniers exercices. Cet écart entre les adhérents actifs et les adhérents à jour qui sous-estime d’ailleurs la réalité, car il arrive assez fréquemment que des personnes n’ayant pas versé depuis un plus grand nombre d’années le fassent de nouveau, suffit à lui seul, et largement, à expliquer le résultat déficitaire de 1994 et 1995. En ce qui concerne l’origine des adhérents, on peut affirmer qu’Enseignement et Liberté, qui compte par exemple trois fois plus de médecins identifiés comme tels que de professeurs, n’est pas un groupement de spécialistes, encore moins une organisation défendant des intérêts catégoriels, mais une expression de l’opinion très majoritaire dans notre pays en faveur de la liberté d’enseignement. VOTE DES RÉSOLUTIONS A la suite du débat, les résolutions proposées par le conseil d’administration ont été votées à l’unanimité par l’assemblée. Elles portaient sur :
M. Jean Cazeneuve présente le rapport du jury : L’association Enseignement et Liberté, sous la présidence éclairée du professeur Maurice Boudot et avec la précieuse collaboration de Philippe Gorre, a décidé de créer, il y a quelques années, un Grand Prix destiné à récompenser, tous les deux ans, l’auteur d’un ouvrage se rapportant à la liberté d’enseignement qui est, nous le savons tous, nous le pensons tous ici, une des valeurs essentielles de notre civilisation. Le jury que j’ai l’honneur de présider en compagnie de M. Roland Drago, membre de l’Institut, Yves Durand, ancien recteur chancelier, Lucien Gorre, contrôleur général, et Pierre Magnin, ancien recteur chancelier, a cette année, et à l’unanimité, attribué ce Grand Prix à deux ouvrages conjointement. D’une part, un livre publié aux éditions Frison Roche ayant pour titre Les Déshérités du savoir et pour auteurs le recteur Armel Pécheul et Bernard Kuntz. D’autre part, un mémoire de DEA, présenté à l’université d’Aix-Marseille, par Nicolas Marquès, intitulé L’Évolution des institutions d’enseignement supérieur en France. En outre, le jury a décidé d’accorder une mention spéciale au mémoire de licence en droit canonique présenté à l’Institut catholique de Paris par M. Louis-Gilbert Rey qui a pour titre L’Immobilier au service de l’enseignement catholique. Le livre écrit par Bernard Kuntz et Armel Pécheul traite essentiellement de la réforme du système scolaire dans notre société. Le jugement qu’ils portent sur la situation actuelle est plutôt sévère. Ils condamnent en particulier l’abus des expériences qui ont, dans les années précédentes, démantelé le système enseignant. Les auteurs tiennent cependant compte des problèmes posés par l’augmentation de la démographie scolaire et par le caractère composite de la population. Mais on constate, en tout cas, que l’égalitarisme excessif engendre des inégalités criantes, que certaines zones de non-droit sont tolérées et qu’on ne tire pas les conclusions de l’échec du collège unique pour le reformer ; enfin que le baccalauréat débouche sur des études universitaires dévaluées. L’ouvrage comporte aussi une partie constructive qui propose notamment de diversifier les parcours, de créer des établissements publics vraiment autonomes en libérant l’école du carcan centralisateur. Ce livre est fondé sur une bonne connaissance des défauts du système actuel et il propose des réformes qui font largement référence à la liberté de l’enseignement. Bernard Kuntz : C’est un prix qui nous fait beaucoup d’honneur. Nous sommes à la fois ravis et flattés et, surtout, ce qui est important c’est que cela nous conforte dans le combat qui est le nôtre car, cette journée en témoigne largement, mon coauteur et moi avons parfois l’impression de combattre un monstre aveugle et avec grande difficulté. Mais le succès d’aujourd’hui prouve que nous ne parlons pas dans le vide ni dans le désert et que nous sommes parfois entendus. Donc je crois qu’il faut que nous continuions. Jean Cazeneuve : Le mémoire de DEA de M. Marquès est actuellement sous forme dactylographiée, mais nous espérons que cette récompense aidera à la publication d’un travail original, utile et très bien documenté. Il a pour titre L’Evolution des institutions d’enseignement supérieur en France. Il traite des rapports entre les universités et l’Etat et insiste sur les problèmes d’ordre économique ce qui est un sujet jusqu’ici peu traité, avant ce colloque bien sûr. Il était donc utile de le faire. Il a été réalisé à l’université d’Aix-Marseille III dans le cadre du diplôme d’études approfondies qui est intitulé Analyse économique des institutions. Après avoir exposé les arguments des partisans et des adversaires de l’intervention de l’Etat dans les institutions universitaires, l’auteur montre qu’il faut une réforme fondée sur la notion de responsabilité. Il serait bon, d’après lui, de restaurer les droits de propriété et ce qu’il appelle les liens marchands entre les établissements et les usagers. Les chèques éducation dont nous avons beaucoup parlé ici ou les prêts bancaires permettraient d’envisager une libéralisation du système éducatif. En s’inspirant du projet d’universités indépendantes et des techniques élaborées dans d’autres pays, nous venons d’en avoir des exemples, il semble possible de réintroduire une offre privée, dynamique. Nicolas Marquès : La rédaction de ce mémoire m’a permis d’approfondir l’économie et de découvrir d’autres domaines comme l’histoire. Des travaux d’historiens montrent que l’enseignement a pu exister sous la responsabilité des familles et à leur charge pendant des siècles. Je remercie infiniment le jury. Tweet |