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Assemblée Générale extraordinairedu 16 juin 2023
L’assemblée s’est réunie, sous la présidence du recteur Armel Pécheul, le 16 juin 2023, à 17 heures, conformément à la convocation adressée aux adhérents à jour de leur cotisation.
Après avoir constaté que le quorum de 10% des membres à jour de leur cotisation présents ou représentés exigé par les statuts pour que l’assemblée puisse se prononcer sur la dissolution de l’association proposée par le conseil d’administration était atteint, le Président rappelle qu’elle avait été créée en 1983, pour faire échec au projet de Service public unifié et laïque, porté par M. Savary, ministre de l’Education nationale dans le gouvernement de Pierre Mauroy.
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Questions crucialesLettre N° 41 - 3ème trimestre 1993
SOPHISMES, MENACES ET CHANTAGE L’ONT-ILS EMPORTE ? SOPHISMES, MENACES ET CHANTAGE L’ONT-ILS EMPORTE ? A la veille des vacances, l’événement politique majeur, sortant de la grisaille d’une cohabitation tenue pour "douce", ce fut le refus du président de la République de voir inscrit à l’ordre du jour de la session extraordinaire du Parlement l’examen de la proposition de révision de la loi Falloux. Cette proposition, due à l’initiative de M. Bourg-Broc, adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, avait été bloquée au Sénat qui n’avait pas pu se prononcer dans les délais, en raison de l’obstruction. Où en sommes-nous aujourd’hui dans ce conflit, et comment ont évolué les diverses questions pendantes relatives à l’enseignement ? Une campagne de sophismes Il fallait être bien naïf pour s’étonner du veto présidentiel. Car, enfin, pourquoi les parlementaires socialistes auraient-ils déployé des trésors d’imagination pour retarder l’adoption du texte et triompher bruyamment le 30 juin à 23 heures, au moment où les obstructeurs avaient gagné (selon le mot de M. Bayrou) ? Naturellement pas pour retarder la loi de quelques jours, ce qui eût été se donner beaucoup de mal pour rien. Pourquoi le ton aurait-il monté au point qu’on se croyait revenu aux plus beaux jours du socialisme triomphant de 1981, voire à 1905 ? Pourquoi des personnages, qui tentaient, tel M. Rocard, de se donner une image avantageuse de modération sur les problèmes de liberté de l’enseignement, brisent-ils une image patiemment construite en tenant des propos incendiaires au congrès socialiste de Lyon, ou lors de la séance de "7/7" qui le suit immédiatement ? Bien entendu, ce n’est pas pour obtenir une semaine ou deux de délai. Le veto présidentiel n’a peut-être pas été décidé avant le 30 juin, mais tout se passe comme s’il avait été programmé dans une stratégie savante d’affrontement, mise en œuvre avant cette date. D’ailleurs, c’était un secret de polichinelle qu’on risquait ce veto : deux jours avant, le 28 juin, Le Figaro (p. 6) évoquait cette menace. Tous les arguments sophistiqués de la campagne médiatique pour soutenir ce veto, le justifier et surtout en tirer tous les fruits ont été visiblement écrits avant (même au cas où ils sont publiés après) ! Quels sont les thèmes de cette campagne ? D’abord, que la proposition Bourg-Broc était scandaleuse par les conditions de son adoption : c’est "en fin de session, presque à la sauvette, en faisant délibérer quand les professeurs sont en vacances, c’est-à-dire dans l’incapacité de manifester leur désaccord" (Michel Rocard à TF1). D’ailleurs, on fait savoir que l’Elysée souhaite que le Parlement se donne "un délai de réflexion" et "élabore un texte qui ne se ressente pas des conditions de précipitation dans lesquelles il a été conçu", (d’après Le Monde du 2 juillet, p. 8), alors qu’il n’y a pas urgence et qu’une loi qui a attendu 143 ans pour être révisée peut bien attendre un peu plus. Et l’on voit des commentateurs présenter le projet de révision comme un véritable coup de force de la majorité, une offensive fulgurante et imprévue brisant la paix scolaire, établie par Jack Lang ! On peut supposer que ces commentateurs sont mal informés. Mais il serait assez surprenant que l’Elysée ou M. Rocard ignorent que cette proposition figurait dans le programme de la majorité politique au pouvoir aujourd’hui, qui, lorsqu’elle n’était qu’opposition, d’année en année soulevait le problème, déposait de multiples propositions sinon rigoureusement identiques à celle de M. Bourg-Broc, du moins très voisines d’elle, sans d’ailleurs susciter un tel émoi des ministres socialistes. L’article intitulé "Monsieur Veto" apporte une petite documentation à ce sujet ! Le "délai de réflexion" on l’a donc déjà eu, et il n’y a eu nulle précipitation dans la conception et l’adaptation du projet. Ce premier sophisme débouche immédiatement sur un autre. Peut-être le projet a-t-il été longuement mûri et non moins longuement débattu au Parlement, mais il n’est pas le fruit d’une négociation. Qu’est-ce à dire ? Avec qui fallait-il donc négocier ? En premier lieu, les parents d’élèves d’établissements sous contrat et les représentants de ces établissements ; mais ils ne protestent pas aujourd’hui, et, au début du mois de juin, M. Bayrou avait dû calmer leur impatience. En second lieu, tous les Français concernés indirectement, au moins en ce qu’ils sont contribuables. Mais ils se sont prononcés à l’issue d’une campagne électorale par le choix qu’ils ont fait d’une écrasante majorité de députés favorables à la révision de la loi Falloux. Alors de quoi s’agit-il ? La vérité est manifeste. On aurait souhaité qu’avant d’être présentée au Parlement la proposition ait été soumise au jugement de quelque comité d’experts, chargés de donner une approbation préalable ou de formuler un veto. Cette méthode de "négociation" a toujours eu les faveurs de M. Rocard, quand il était Premier ministre, mais il n’est pas le seul à en avoir fait usage. Elle offre un moyen feutré de contourner la représentation nationale ! Bien entendu, dans cet aréopage auraient figuré des représentants des partis et des syndicats d’enseignants de gauche, bref de vrais amis du Comité national d’action laïque. C’est parce qu’on ne l’a pas fait que pleuvent les accusations d’avoir procédé de façon brutale, dans un esprit de revanche. Encore faut-il expliquer pourquoi il était nécessaire de procéder de façon si précautionneuse. Et c’est ici que commence le troisième sophisme : l’adoption de la proposition de révision de cette loi Falloux qui serait "un des derniers remparts de la laïcité" est un projet d’une droite "extrême", qui n’a pas peur de mériter le qualificatif de "la plus bête du monde". Bête et, semble-t-il, aussi "méchante", écrit-on dans Globe-Hebdo (14 au 20-7-93, p. 16), et Henri Caillavet, ancien sénateur, président du comité Laïcité-République, n’hésite pas devant l’amalgame : c’est du "révisionnisme antilaïque", qui conduirait à un "apartheid scolaire" ; d’ailleurs on apprend que "l’Eglise romaine s’oppose, en toute occasion, aux progrès de l’homme, et, surtout, à la libération des femmes" (!) Abandonnons cet auteur à ses extravagances, car il y a encore plus significatif. C’est l’article de M. Jean-François Hory, le nouveau président du MRG qui est un peu sorti de l’obscurité pendant l’été, lorsqu’on l’a vu sur les écrans de télévision au côté de son nouvel adhérent, M. Tapie. Cet article est publié dans Le Monde (2-7-93, p. 8) sous le titre : "la laïcité, un archaïsme revendiqué". Ce texte était digne d’attirer l’attention de diverses personnes, notamment Gérard Leclerc (dans Le Quotidien de Paris 2-7-93, p. 6). Au moins M. Hory ne cache-t-il pas sa pensée : ce qu’il déplore c’est cette "opinion officielle de droite et de gauche qui, au prétexte de tolérance, arme l’intolérance", car "de toutes parts, remontent dans notre société les mauvais ruisseaux de l’irrationnel et de la religiosité" ; l’Europe de l’Est étant évoquée à titre de mauvais exemple ! Et M. Hory questionne : "Se trouvera-t-il, à la fin, un responsable politique de ce pays pour dire que la République est déjà assez bonne fille en tolérant l’obscurantisme pour qu’on ne lui demande pas en outre de le financer". Le simple fait du pluralisme scolaire écœure M. Hory. Quant à évoquer la décentralisation, la liberté des collectivités territoriales, c’est opposer régions riches et régions pauvres, c’est instaurer la guerre entre les régions où à l’intérieur de chaque collectivité territoriale. Cet argument présenté par M. Malvy dans Le Figaro peut avoir un certain poids auprès des responsables de ces collectivités qui, par couardise, redoutent les débats et la prise de responsabilités. On dresse devant nous un tableau apocalyptique. Et il est alors naturel que les défenseurs d’un projet aussi redoutable soient vilipendés. M. Giansily, président du CNI a-t-il publié un article (fort mesuré) dans Le Quotidien de Paris dans lequel il reprochait à Jack Lang de "tenter d’imposer de nouvelles contraintes aux écoles libres : obligation d’intégrer des handicapés, des enfants d’immigrés", réaction, disait-il, "significative de la haine de Jack Lang à rencontre du système éducatif libéral" et le voilà pris à partie dans Témoignage Chrétien du 2 juillet, qui profite d’ailleurs de l’occasion pour régler son compte à M. de Villiers (qui n’a pas co-signé l’article en question !) : "La libéralisation sauvage reste l’objectif d’une partie de l’UDF (du côté de Léotard, voire de Villiers [...] De Villiers - le roitelet de Vendée - et consorts ont plus d’un plan dans leur sac pour casser "l’école laïque" de la République au profit du privé pas forcément le plus catholique." Des sophismes aux menaces Tout ceci serait parfaitement ridicule si la véhémence des propos ne témoignait pas de la profondeur du sectarisme, de la violence des passions rentrées. En fait, ce n’est pas qu’on craigne que la guerre scolaire soit rallumée, c’est qu’on l’espère. Et on crie d’autant plus fort qu’on veut rejeter sur le camp adverse la responsabilité de la rupture de ce qu’on ne tient que pour un simple armistice, comme ceci va apparaître clairement. La gauche laïque a décidé l’offensive. Pourquoi avoir choisi ce moment et cette question, à vrai dire d’importance mineure ? C’est d’abord qu’en laissant adopter la proposition Bourg-Broc, M. Bayrou a violé un principe sacré : seule la gauche a le droit d’établir la paix scolaire ; elle seule peut accorder tel ou tel avantage (réel ou fictif) à l’enseignement privé. On peut bien grogner lorsqu’on évoque les accords sur la formation des maîtres que Jack Lang a signés avec Max Cloupet, mais, lui, avait au moins le droit de les signer parce qu’il était de gauche. M. Bayrou ne l’a pas parce qu’il n’est que centriste ! On sait que cette attitude trouve un accueil favorable dans de larges secteurs de la hiérarchie religieuse, qui veut surtout ne rien faire qui puisse profiter à la droite. On comprend aisément que la gauche tienne à ce qu’aucun fait ne mette en cause l’idée qu’elle seule peut être dispensatrice de bienfaits pour l’enseignement privé. De là , les vociférations dont elle nous assourdit dans l’occurrence présente. Mais l’autre avantage de cette opposition est que la gauche peut refaire à bon compte son unité sur cette question, même si cette unité est fissurée sur toutes les autres questions. Et c’est ainsi qu’on peut projeter une grande manifestation avec participation de toutes les organisations (de SOS-Racisme aux syndicats d’enseignants...). Encore faut-il pour que ce rassemblement ait quelque crédibilité que ne soit pas trop évident son caractère de basse manœuvre politicienne. C’eut été une suprême maladresse que de mettre en avant MM. Poperen ou Laignel ; aussi les a-t-on peu entendus. Bien sûr tous les socialistes iront de leur petit couplet contre la révision de la loi Falloux (son "aggravation", dit comiquement M. Malvy). Mais, chez certains, la conviction manque un peu : MM. Chevènement ou Lang sont trop intelligents pour se compromettre en donnant trop d’importance au problème. Il reste alors à confier un rôle à des personnages inconnus : Caillavet, en semi-retraite, Hory, un nouveau venu, Pierre Bergé, de l’Opéra-Bastille et de Saint-Laurent, même pas un professionnel. Ils donneront le ton à la campagne médiatique. Et M. Rocard, qui vient d’accéder à la présidence du P.S. devra contraint et forcé endosser l’uniforme, j’allais dire la "livrée", du parfait disciple du Petit Père Combes. Je crois que certains n’auront pas beaucoup pleuré sur son triste sort ! De cette union de la gauche, on a fait une menace qui s’est transformée en argument contre M. Bayrou. Ainsi voit-on écrit dans le Progrès de Lyon (9-9-93, p. 3), quotidien régional de diffusion notable : "Les laïcards" peuvent être reconnaissants à François Bayrou. Son initiative a eu le même effet que celle de la gauche, à son arrivée au pouvoir, voulant instaurer un grand service d’éducation unifiée. Et on nous expliquera que le gouvernement socialiste avait dû renoncer devant la mobilisation des défenseurs de l’école libre et que, dans le contexte actuel, d’appel à manifester de toutes les "organisations laïques", "le camp laïc" espère faire aussi bien, sinon mieux, qu’au début des années 80 les partisans de l’école privée. Et ils étaient nombreux. Je cite ce texte non pour son originalité, mais parce qu’il est représentatif d’une pensée qui s’est répandue - ou plutôt qu’on a répandue - aux quatre coins de la France depuis presque trois mois. Mais, naturellement, même un enfant de chœur sait qu’on n’organise pas une manifestation d’importance en quelques jours. La menace n’avait de consistance, elle n’avait même de sens, et l’unité de la gauche était autre chose qu’une rencontre sans lendemain, que si on disposait d’un délai suffisant, que si l’affaire Falloux n’était pas réglée au début du mois de juillet. L’issue vint du Ciel et la chiquenaude divine mit en marche toute la machine. M. Mitterrand refusa d’inscrire l’examen de la révision de la loi Falloux à l’ordre du jour de la session extraordinaire demandée par Balladur. Il s’expliqua : il acceptait toutes les autres questions, mais, dans ce cas, la loi Falloux avait bien attendu 143 ans, pourquoi pas 3 mois de plus ? Ceci donnerait d’ailleurs au Parlement "un délai de réflexion", ce qui laisse à entendre que les parlementaires sont des écervelés qui doivent être reconnaissants au président de leur donner l’occasion de corriger leur faute ! On s’est interrogé sur la légalité du veto présidentiel. M. Foyer qui a suffisamment travaillé à l’élaboration de la constitution qui nous régit pour être tenu pour le meilleur expert en la matière, publia dans le Figaro du 9 juillet un texte intitulé "Le coup d’Etat du pauvre". Il affirme que la situation est sans équivoque : "Le pouvoir de convoquer le parlement et d’en déterminer l’ordre du jour est un pouvoir lié [...] Dès qu’il est saisi d’une demande du Premier ministre ou de la majorité des députés, le président de la République n’a aucun pouvoir d’appréciation, il doit convoquer sur l’ordre du jour demandé." Mais, à peine peut-on parler d’abus de pouvoir dès lors que M. Balladur a cédé devant les exigences présidentielles. Le délai obtenu, le grand rendez-vous laïc pris pour le 3 octobre retrouvait toute sa signification. Quoiqu’on s’en défende, l’intention était bien de rééditer l’affaire Devaquet avec à peu près le même "timing". Dans quel but ? Faire reculer le gouvernement et déconsidérer la majorité actuelle. Ceci est clairement avoué. Parmi les nombreux textes dont on dispose, je ne retiendrai que le plus significatif, celui de M. Pierre Bergé qui pour louer le président de la République de sauver la laïcité retrouve les accents du poète remerciant Staline d’avoir sauvé la patrie : "En repoussant de plusieurs semaines l’abrogation de la loi Falloux, François Mitterrand nous permet de nous reprendre, de nous grouper et de tout faire pour défendre l’école laïque. Là encore la gauche a déçu, quand elle n’a pas trahi. Il reste à mobiliser l’opinion... "Le 24 juin 1984 fut un jour de deuil pour la France. Donnons rendez-vous au destin un jour du mois de septembre prochain [en fait ce sera octobre] pour dire non à ce projet inique et sauver l’école laïque". Tout est clair, c’est bien de revanche qu’il s’agit et nul doute ne doit subsister sur l’identité du camp qui aura rallumé la guerre scolaire. La drôle de guerre. Ces menaces étaient destinées à faire peur et elles ont eu leur effet. On a bien essayé de nous faire croire que tout rentrerait dans l’ordre en octobre, mais il était clair que le gouvernement préférait pour le moins contourner l’obstacle et éviter l’affrontement à la rentrée dans des circonstances défavorables. En conséquence, tout au long de l’été tombaient des mesures qui étaient en recul par rapport à ce qu’on avait annoncé. Par exemple, la réforme des IUFM qui devait être radicale s’amenuise comme peau de chagrin et sera au bout du compte bien en deçà des propositions de la commission Kaspi (qui a travaillé vite et bien). L’expérience seule nous dira ce qui a été décidé, car tout reste dans le flou, mais j’ai peur que sur ce problème déterminant nos espoirs soient déçus. Par ailleurs, M. Bayrou a pris des décisions très bien venues sur l’organisation de l’enseignement des langues anciennes dans les lycées ; mais il s’agit d’un problème sectoriel. Quant à la loi Fillon "relative aux établissements publics à caractère scientifique" qui devait accorder à titre expérimental un statut dérogatoire avec large autonomie conférée aux universités, elle a été déclarée globalement contraire à la Constitution, sous des prétextes futiles (le législatif abandonnant trop de ses prérogatives et l’indépendance des professeurs, "principe fondamental reconnu par les lois de la République", pouvant être menacée, menace tout imaginaire, mais pièce traditionnelle de la fantasmagorie de gauche !) ; bref, le Conseil constitutionnel a parachevé l’action présidentielle mais du même coup il prive les organisations étudiantes de leur principale raison de se joindre aux manifestations des laïcs. Au terme des vacances, aucune décision d’importance n’aura été prise et comme il a suffi qu’on parle de chasse aux sorcières pour qu’on limite le nombre de changements dans le haut personnel de l’Education nationale, on peut dire que jusqu’à maintenant on s’est contenté de gérer l’héritage de MM. Jospin et Lang en procédant à quelques aménagements de détail. Cette prudence, ou cette timidité, se manifeste dans la présentation de chacun des projets ministériels. M. Bayrou à été invité, le 5 septembre, à la première "heure de vérité" de la saison : il ouvrait le feu et s’est dégagé habilement des pièges tendus par des journalistes agressifs. Mais, à quel prix ? Lorsqu’on l’interroge sur les moyens de rétablir la sécurité dans les écoles, sa réponse peut sembler évasive ; mais est-ce lui qui a la solution du problème et que pouvait-il dire d’autre ? Reste une autre question que le ministre a simplement abordée : l’indispensable réforme du collège unique et la lutte contre l’illettrisme. Comment éviter qu’on scolarise dans des classes hétérogènes et qu’on fasse passer de classe en classe des élèves dont certains sont illettrés ? Certes, M. Bayrou sait remettre à leur place les interlocuteurs qui l’accusent de vouloir "démanteler, casser" le collège unique de M. Haby. En bon professeur de lettres, il sait le poids des mots, mais lorsqu’on l’accuse de vouloir revenir aux "filières séparées", à la sélection, bref de prêcher un retour en arrière, il se croit obligé de se défendre contre cette accusation. Il a très bien compris qu’on ne peut exister politiquement en se donnant l’image d’un rétrograde. Aussi lui faut-il sacrifier aux idées à la mode : on soutiendra contre toute évidence que tous les enfants ont les mêmes capacités, même si les circonstances ont retardé certains ! Bref, un excellent diagnostic, des intentions louables, mais beaucoup de flou lorsqu’il s’agit de proposer des remèdes. L’affaire Falloux a visiblement été prise comme une leçon de prudence par le ministre. Mais qu’a-t-il décidé en la matière, puisqu’il était là, sur les écrans de télévision, pour nous le dire, comme l’avait annoncé M. Balladur ? Une reculade qui n’en est pas une ! On constitue, sous la présidence du doyen Vedel, une commission d’information qui a pour charge exclusive de faire le bilan d’une législation extrêmement complexe sur l’aide que peuvent ou que doivent apporter les collectivités locales à l’enseignement privé pour les dépenses immobilières. Incontestablement, la situation est complexe puisque les choses changent selon l’ordre d’enseignement considéré. Mais M. Bayrou qui a fait devant les caméras un exposé convaincant est apparemment parfaitement informé, et d’ailleurs chaque département ministériel comporte des juristes professionnels capables de répondre, sur de telles questions, aux interrogations des politiques. La nécessité de la commission Vedel n’apparaît pas. Lorsque M. Bayrou a dit : "Nos intentions étaient justes, mais elles n’ont pas été bien comprises", il sait très bien que ce n’est pas la différence entre l’enseignement général et l’enseignement agricole qui a fait difficulté, mais des questions de principe et de choix politique. Ces questions, la commission Vedel ne les résoudra pas si elle reste dans le cadre de sa mission. Tout le monde l’a compris. Il s’agissait de trouver une façon élégante de différer une décision qu’on n’avait pu prendre avant les vacances. M. Bayrou reste attaché à son projet qu’il tient pour "juste" et il n’y a pas la moindre raison de mettre en cause la sincérité de sa conviction, mais on a jugé bon de remettre à des temps meilleurs l’affrontement. Toutefois, la solution trouvée ne peut être que temporaire. Le secrétaire général de l’Enseignement catholique commence à manifester une impatience à laquelle nous n’étions pas habitués. Précisant que "la commission Vedel n’est pas là pour proposer des amendements et qu’une mission d’information peut travailler vite", il annonce que si elle mettait plus d’un mois et demi ou deux mois pour conclure il "commencerait à trouver que c’est long". Il est vrai qu’aujourd’hui il tempère cette étonnante fermeté, il multiplie les engagements qui vont au-devant des demandes de M. Lang : "veiller à répondre en priorité aux besoins à caractère social que l’Enseignement catholique percevrait ..." (Enseignement catholique actualités, n° 185) ! Les adversaires s’observent donc sans s’affronter et il ne se passe rien, comme lors de la drôle de guerre en 1939-40. Mais une telle situation ne saurait être durable. Quelle sera l’issue ? Nul ne peut le dire. Toutefois l’expérience enseigne que qui a commencé à reculer sans gagner un pouce de terrain connaîtra à la fin une vraie déroute. Maurice Boudot On sait que le président de la République a profité de la solennité du 14 juillet pour faire l’éloge de Bernard Tapie et de la loi Falloux. Sur le second point M. Mitterrand a déclaré qu’il n’y avait pas d’urgence à modifier une loi en vigueur depuis près de 150 ans et qu’il avait voulu donner aux parlementaires un temps de réflexion. Sur un ton différent, M. Rocard a dit la même chose lors de sa prestation à l’émission 7/7. En réalité la proposition de loi rédigée par des membres de l’actuelle majorité à l’Assemblée nationale ne fait que reprendre le vœu exprimé par les mêmes parlementaires lors de la précédente législature, alors qu’ils étaient dans l’opposition. Le ministre de l’Education nationale de l’époque leur répondait en substance qu’il estimait qu’il ne fallait pas remettre en cause l’équilibre législatif existant - ce qui, implicitement, condamnait a posteriori le projet Savary - et qu’il appartenait à ces parlementaires de changer la loi dans le cas où il reviendraient au pouvoir. C’est ainsi que M. Jospin, interpellé par M. Préel, le 5 novembre 1990 au Palais Bourbon, répondait : "Quand le Conseil d’Etat interprète les dispositions de la loi Falloux d’une façon qui limite les possibilités de financement des investissements par les collectivités locales, je m’y tiens et je n’ai pas l’intention - si d’autres veulent prendre des initiatives, ils les prendront - de proposer, au nom du gouvernement, une modification de l’équilibre législatif existant. Je ne crois pas que se soit la priorité en matière éducative." (P. 4727 du J.O.) Dans la même enceinte, le 7 novembre 1991, à M. Couanau lui rappelant : "Un amendement a été adopté par le Sénat en vue de permettre aux collectivités locales de participer financièrement aux travaux de construction et de rénovation des lycées, des collèges et des écoles privées. Quelle sera votre attitude à l’égard de cet amendement lorsque nous le reprendrons à l’Assemblée nationale ?", le même ministre d’Etat, ministre de l’Education nationale, répliquait : "J’ai déjà eu l’occasion de dire qu’il ne relève pas de mon mandat, tel que je l’ai compris et reçu, ni de celui du Gouvernement, eu égard à notre engagement devant les électeurs, de revoir complètement le cadre législatif régissant les relations entre l’Etat et les établissements privés sous contrat. Si l’amendement auquel vous avez fait allusion est discuté dans cette assemblée, nous verrons bien le sens dans lequel les parlementaires souhaiteront se prononcer." (P.5653 du J.O.) Ajoutons, pour ceux qui penseraient perfidement qu’il s’agissait dans ces exemples de propos en l’air, que M. Jospin, écrivant dans le Journal officiel du 23 mars 1992 "Une éventuelle modification de la loi Falloux n’apparaît pas opportune car il ne convient pas de remettre en cause l’équilibre législatif existant", avait eu tout le temps de tourner sa plume dans l’encrier puisqu’il répondait aux questions écrites posées par sept parlementaires entre le 17 juin et le 14 octobre 1991. Mais le plus étonnant est que l’ancienne majorité socialiste avait elle-même envisagé la suppression de la loi Falloux. Peut-on suspecter le témoignage de M. Cérisola, alors président de l’UNAPEL, dans Le Figaro du 9 mai 1992 "J’ai dit à M. Lang que si l’on continue à refuser, comme l’avait fait son prédécesseur M. Jospin, tout dialogue constructif, l’école catholique est menacée d’asphyxie", puis : "M. Lang se dit pragmatique et ouvert au dialogue", et : "il faut que les collectivités territoriales qui le désirent puissent participer davantage aux opérations de construction et de grosse rénovation de nos établissements." Doit-on taxer de naïveté M. Girard, Secrétaire général adjoint de l’Enseignement catholique, déclarant dans Enseignement catholique actualités de janvier 1992 : "La majorité a repoussé l’amendement (abrogeant la loi Falloux) arguant que ce n’était pas le lieu opportun pour insérer cette mesure [...] C’est plus probablement le temps qui n’était pas opportun [...] Un débat à reprendre et à suivre..." Mais comment ne pas faire confiance à l’auteur anonyme d’un article publié dans Le Canard enchaîné du 7 juillet 1993 assurant : "Au printemps 1992, Lang, avait, lui aussi, demandé par écrit à Mitterrand de sacrifier la loi Falloux. Au grand désespoir du ci-devant ministre d’Etat, Mitterrand avait dit non." Que le président de la République n’ait pas retenu ou ait méconnu tout cela est attristant ; que le candidat "naturel" à sa succession n’ait pas voulu faire entendre son "parler vrai" en cette occasion est inquiétant. L. G. La révision de la loi Falloux, visant à autoriser l’aide des collectivités territoriales aux investissements de l’enseignement privé, connaît un sort qui lui est propre : proposition de loi d’origine parlementaire, elle est la seule question en cours d’examen dont le président de la République ait refusé l’inscription à l’ordre du jour de la session extraordinaire. L’extravagance des propos de parlementaires socialistes qui se livraient à des manœuvres d’obstruction, les interventions au congrès de Lyon qui font du laïcisme le plus borné un pilier du socialisme, prouvent que la guerre scolaire a recommencé, et l’identité de l’agresseur est indéniable. On se croit revenu à 1905, à ceci près qu’à l’époque l’enseignement public fonctionnait, alors qu’il est aujourd’hui miné par une politique catastrophique qui a notamment réduit les écoles de banlieue à l’état que l’on sait. La loi Falloux est réservée comme un thème d’agitation - parmi d’autres - pour un automne qui s’annonce chaud dans le secteur de l’éducation. Les responsables de l’Enseignement catholique sont naturellement libres de suivre les autorités politiques qui soutiennent, contre toute évidence, que l’affaire est une simple "déception" et non un incident. le 4 juillet 1993 Nous avons appris avec tristesse le décès de deux anciens administrateurs d’Enseignement et Liberté :
Courtois et affable, il écoutait attentivement tous les points de vue mais restait inébranlable dans ses convictions quand la survie de l’Enseignement catholique était en jeu. Il avait tout de suite compris l’intérêt qu’il y avait pour la liberté de l’école à rassembler tous ses partisans et avait ainsi largement contribué à la création d’Enseignement et Liberté. Tweet |