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Assemblée Générale extraordinairedu 16 juin 2023
L’assemblée s’est réunie, sous la présidence du recteur Armel Pécheul, le 16 juin 2023, à 17 heures, conformément à la convocation adressée aux adhérents à jour de leur cotisation.
Après avoir constaté que le quorum de 10% des membres à jour de leur cotisation présents ou représentés exigé par les statuts pour que l’assemblée puisse se prononcer sur la dissolution de l’association proposée par le conseil d’administration était atteint, le Président rappelle qu’elle avait été créée en 1983, pour faire échec au projet de Service public unifié et laïque, porté par M. Savary, ministre de l’Education nationale dans le gouvernement de Pierre Mauroy.
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Questions crucialesLettre N° 69 - 3ème trimestre 2000
LES VERITES SUCCESSIVES D’UN ANCIEN MINISTRE LES VERITES SUCCESSIVES D’UN ANCIEN MINISTRE La publication par Claude Allègre du livre d’entretiens avec Laurent Joffrin, sous le titre Toute vérité est bonne à dire (chez Robert Laffont) constitue le testament politique de celui qui fut pendant un peu plus de trois ans chargé de l’Éducation nationale, fonction qu’il occupa de façon assez bruyante, jusqu’au moment où il fut un peu sèchement remercié par un Premier ministre qui était aussi un ami de longue date. L’éclairage apporté par l’ouvrage sur ces années de gestion ministérielle est un document essentiel qui nous permet de compléter notre information et éventuellement de réviser notre jugement. L’image que donne de lui M. Allègre est d’une espèce de météore politique qui ne fait qu’une assez brève mais notable apparition dans le personnel politique. C’est erroné : l’auteur connaît Jospin depuis 1958 dont le rapprochent ses engagements politiques. L’un et l’autre sont membres du nouveau PS depuis 1973 et jouent un rôle important dans les instances du parti. En 1988, Allègre est élu député européen mais démissionne très vite car il trouve les fonctions incompatibles avec la charge de conseiller technique du ministre de l’Education nationale, Jospin. Il a participé au calamiteux congrès de Rennes où il joue un rôle non négligeable chez les adversaires de Fabius. Cette hostilité est d’ailleurs une constante de ses attitudes politique, ce qui lui a d’ailleurs valu d’être convoqué par Mitterrand pour s’expliquer sur les complots antifabiusiens dont il était tenu pour être un animateur ! En fait, à travers des propos marginaux, il apparaît que globalement M. Allègre peut défendre des positions raisonnables. À titre d’exemple, je citerai ce qu’il dit au sujet du désamiantage de Jussieu, opération conduite sous la pression d’un petit groupe gauchiste qui a appliqué de façon aberrante le fameux principe de précaution, en partant de données de base très contestables, alors que d’autres mesures dont la santé publique serait plus bénéficiaire auraient pu être prises, par exemple, une campagne de dépistage de tumeur maligne aurait donné des résultats plus notables. Il y a donc chez ce technicien de la politique une indépendance d’esprit appréciable. Mais lorsqu’il en vient à établir son bilan à la tête du ministère, M. Allègre ne regrette rien, quant au fond. Tout au plus se repent-il de quelques maladresses d’expression. Mais, selon lui, l’affaire serait très claire, il a été sacrifié à un syndicat, le SNES auquel il avait cru pouvoir résister. C’est Mme Vuaillat qui aurait décidé de se débarrasser de ce ministre indocile qui lui barrait la route. L’objectif du SNES est de s’opposer à toute réforme, ou plus exactement, de ne les admettre que dans la stricte mesure où il en tire bénéfice pour ses adhérents ; ce qui est obtenu grâce à l’accroissement de la population scolaire, la baisse du niveau et des avantages multiples dans l’organisation de l’année scolaire. Une réforme sans contrepartie d’avantages est tenue pour un échec ; il va sans dire que des raisons strictement pédagogiques, sans prendre en considération l’intérêt des maîtres n’ont pas lieu d’être. Fort de sa victoire sur M. Bayrou qu’on a pu remettre en place après sa réforme manquée qui consistait à exiger une révision de la loi Falloux, le SNES a cru pouvoir s’imposer d’autant plus facilement à M. Allègre, beaucoup plus proche de lui politiquement. Mais, dès les premières déclarations ministérielles, force est de constater qu’il y a entre les deux parties un conflit violent. Le premier différend éclate au sujet d’un problème en apparence très secondaire : il s’agit du mode de calcul de la rémunération des heures supplémentaires annuelles ; il ne s’agit pas de la rémunération principale des professeurs mais d’une partie des indemnités pour les heures supplémentaires qu’ils effectuent. Pour " régulariser " les choses, M. Allègre décide que l’indemnité sera calculée sur 36 semaines et non plus sur 42, l’argent économisé servant alors à créer des emplois jeunes. Etaient visés essentiellement les professeurs des classes préparatoires aux grandes écoles, grands consommateurs de ce type d’indemnités, mais dont M. Allègre pense qu’ils ne sont vraiment pas à plaindre. Décision radicalement maladroite car il n’était pas habile d’attaquer les intérêts de la partie la plus efficace du corps enseignant ; quant à faire appel à sa générosité puisqu’il s’agit, par ces économies, de créer des postes destinés aux chômeurs, c’est une singulière illusion sur le sens de la solidarité, même dans un public de gauche ! Mais surtout les effets de cette mesure ont été mal estimés. Son instauration devait faire perdre 100 à 200 francs par mois à certains professeurs ; en réalité pour certains il s’agit d’une réduction de plusieurs milliers de francs. Indépendamment du fait qu’aucune mesure de déflation n’est bien accueillie, cette économie sur le dos des professeurs les plus efficaces ne pouvait que produire le plus funeste effet, et comme le ministre s’enferre dans des calculs approximatifs il est soupçonné des plus noirs desseins. La bataille avec le SNES, syndicat qui n’a pas à son programme la gestion des vaches maigres à l’Education, avait commencé. La critique de l’absentéisme des enseignants devait mettre le feu aux poudres. Une déclaration imprudente dans laquelle le ministre estimait à 12% le taux d’absentéisme, nullement destinée au grand public et divulguée contre son gré, crée le scandale. Aujourd’hui son auteur persiste et signe, simplement il insiste sur le fait que ces absences sont effectivement justifiées. Mais le mal avait été fait avec la première déclaration. Les professeurs se sentent accusés de bénéficier d’un régime de vacances sans aucun doute avantageux, mais dont ils peuvent soutenir à bon droit que ce n’est pas eux qui l’ont exigé, mais qu’il a été forgé par les politiques pour répondre notamment en ce qui concerne les congés de février aux intérêts des stations de sports d’hiver. Quant aux congés individuels pour raisons de santé je ne crois pas qu’ils soient tellement abusifs ; ils sont à peu près les mêmes d’ailleurs que dans l’ensemble de la fonction publique. M. Allègre a effectué sur ce problème brûlant et qui porte à la démagogie un dérapage en présentant des chiffres vraisemblablement excessifs et en donnant l’impression de vouloir dresser le public contre les enseignants. Tous ces problèmes qui ont alimenté les conflits avec les syndicats concernent en définitive strictement l’intendance. Ils ne concernent aucunement l’organisation de l’enseignement et les contenus dont le ministre s’était dit tellement soucieux. Il semble qu’en définitive, il ait usé son énergie sur ces problèmes d’intendance, de sorte qu’on a négligé les questions de contenu et notamment les programmes. C’est sur ces questions qu’il se montre original dans son livre et tout à fait novateur. Certes, on retrouve bien la critique des programmes surchargés, notamment en matière scientifique, mais avec des arguments assez convaincants (l’enseignement se donne comme mission de suivre le développement de la recherche !), pas de sélection par les maths, etc. mais sur l’essentiel le ministre est très réticent en ce qui concerne la correction pédagogique et il est farouchement attaché au principe de la sélection, hostile en définitive au collège unique, sans se prononcer toutefois sur l’organisation qu’il faudrait mettre à sa place. Je citerai à ce sujet le passage essentiel : " les tenants du collège unique poussent parfois leur raisonnement trop loin. En caricaturant, il devrait y avoir un tronc commun jusqu’à seize ans fondé sur l’apprentissage des méthodes ... Ce mélange confus... a conduit par exemple à l’absurde suppression de l’examen d’entrée en sixième. Résultat, 15% des élèves qui entrent au collège ne savent pas lire... Un collège pour tous, c’est une idée noble et généreuse. Mais si on ne sait pas lire, écrire et compter, on ne doit pas passer au collège. On doit continuer à apprendre à lire, écrire, compter... Ce n’est pas en décrétant que 80% des élèves doivent avoir le niveau du bac qu’on résout le problème... ma position est claire. Il n’y a pas d’éducation sans savoirs, il n’y a pas d’acquisition de méthodes sans solides connaissances, pas plus qu’il n’y a d’éducation sans travail, sans contrôle, sans sanctions " (p. 203) On ne saurait qu’approuver. Mais alors pourquoi avoir unifié les filières, permis à tout élève quels que soient ses résultats le passage de classe en classe sans redoublement. J’avoue être très étonné de découvrir un ministre si hostile à tout ce qu’il a fait, alors que toutes les mesures adoptées pendant trois ans n’étaient quand même pas le résultat des pressions du SNES ! Maurice Boudot UN CONSERVATISME SANS ILLUSION, NI NOSTALGIE La publication par Bernard Kuntz du livre intitulé Prof de droite ? (Chez François-Xavier de Guibert), de façon assez provocante, malgré le point d’interrogation dont la portée dubitative reste assez limitée conduit ce responsable du principal syndicat de l’enseignement secondaire qui s’oppose à l’hégémonie de la gauche à articuler sa conception extrêmement nette et non dépourvue d’originalité. Malgré l’accumulation d’un nombre considérable d’ouvrages très récents sur l’école, Bernard Kuntz parvient à être relativement original, tant dans ses méthodes d’analyse que dans les solutions qu’il retient. Ceci nous vaudra d’ailleurs des pages particulièrement énergiques et bienvenues contre des idées fausses qui traînent pourtant fréquemment dans les programmes " libéraux " ! Si notre auteur, qui avait pourtant déjà publié, en collaboration avec le recteur Armel Pécheul, Les déshérités du savoir sur l’école parvient à être assez neuf, c’est d’abord pour avoir très clairement repéré les causes de l’échec pédagogique de la gauche. En effet le développement d’un système éducatif organiquement lié à la pensée de gauche n’est nullement l’effet du hasard : " si chaque gouvernement socialiste s’empresse d’affirmer le caractère prioritaire de l’Education nationale, ce n’est pas uniquement par démagogie, pour donner satisfaction à ses troupes. C’est aussi parce que l’idée d’une transformation de la société par l’école constitue l’un des piliers de la pensée de gauche... si l’école a pour mission de transformer la société, alors l’Etat qui la gouverne, doit par tous les moyens assumer ses orientations et son fonctionnement ". (pp. 14-15) Ceci est manifeste dès Jules Ferry qui très lucidement ne pouvait inscrire son action que dans une perspective de gauche : " la création de l’école laïque obligatoire s’inscrivait dans une logique de conquête définitive du pouvoir. En formulant le projet de l’école, la gauche ébauchait en même temps un projet de société. " (p. 16). De là le constat que l’absence d’une véritable réflexion sur l’éducation dans la pensée politique de droite n’est aucunement le fruit du hasard. Si la droite se voue à la seule gestion d’un présent régi par les nécessités de l’économie, son programme en matière pédagogique ne peut être que très modeste. Il revient à ce qu’on demande que les règles économiques ne soient pas entravées dans le domaine de l’éducation, de là les propositions courantes en la matière : chèque éducation, autonomie des établissements, privatisations. Il faut bien constater que ce programme apparemment raisonnable ne peut que heurter frontalement les convictions les plus profondes de la plupart des enseignants. La droite ne peut avoir que des avantages à ne pas se compromettre en défendant des mesures qui relèvent d’un libéralisme de pacotille en matière pédagogique, selon M. Kuntz. Malgré cet avantage considérable et encore qu’elle ait eut très longuement le pouvoir, car comme le soutient Kuntz, toutes les réformes et d’abord celle qui instaure le collège unique sont inspirées par la gauche, cette gauche n’a pas réussi. Certes le taux de population scolarisée jusqu’à seize ans a considérablement augmenté, ce qui répondait à un besoin réel. Mais on est parvenu à une situation dans laquelle il est difficile de concevoir qu’on fasse plus pour l’école. La part du PIB consacrée à l’éducation est de l’ordre de 7,4%, la durée de la scolarisation de 19 ans (contre 16,7 en 1982) ; ni l’une ni l’autre de ces données ne peuvent être sensiblement modifiées. Est-ce à dire que cet accroissement des taux de scolarisation conduise à une plus grande justice dans la répartition des compétences ? Non, puisque comme le note François Bayrou (cité p. 29) : " dans cette école de l’égalité, vos chances d’aller au terme de l’enseignement secondaire... et d’y être diplômé varient simplement, modestement de 600% ". Quant aux progrès de la culture liés à cette augmentation de la durée de scolarisation, on en peut douter quand on apprend qu’il y a entre 15 et 20% de " mal lettrés " pour reprendre une donnée liée à une classification commode due à M. Bayrou. Ces échecs de l’enseignement de masse ne sont pas tellement attribuables au collège pour tous ; tout simplement ce collège en prolongeant la scolarité donne l’occasion de les révéler. Il se peut que Bernard Kuntz soucieux de défendre l’effort pour le prolongement de la scolarité sous-estime ce qu’il peut y avoir de nocif dans une scolarité assez longue commune à tous les élèves. En fait, c’est au moment où il expose les principes du pédagogiquement correct qu’il les critique : " rien ne sert dans ces conditions de prétendre à tout prix amener la totalité des élèves au même niveau de connaissance. Rien ne sert au nom d’une prétendue égalité de leur imposer à tous le même et unique enseignement " (p.145) L’ouvrage tout entier repose sur la présentation critique d’un ensemble de préjugés couramment admis dans les discussions sur les problèmes pédagogiques. Ce sont les principes du " pédagogiquement correct " qui seront soumis à l’analyse.
Très habilement, Bernard Kuntz montre que ce sont ces principes qui règlent l’organisation de l’enseignement avec la part considérable accordée à toutes les procédures de remédiation qui tentent, assez vainement, d’éviter les conséquences de l’inégalité des aptitudes et des dons et de maintenir au moins une apparence d’uniformité dans les parcours scolaires. En fait, on aboutit à un gâchis considérable qui fait qu’un élève médiocre se trouve condamné à gaspiller un temps considérable pour n’obtenir qu’une qualification insuffisante sur le plan professionnel, alors que la reconnaissance de son insuffisante aptitude aurait permis de l’orienter différemment. Mais une étape essentielle dans la mise en œuvre de cette pédagogie niveleuse a été franchie lorsqu’on a tenté d’unifier la formation des enseignants de l’école " de base " confiée à un corps unique d’enseignants, objectif imparfaitement réalisé puisque les instituteurs ne sont pas les seuls auxquels est confiée la totalité d’une classe d’âge, mais judicieusement repris par un auteur comme Philippe Meirieu. Toute la pratique de Lionel Jospin n’empêche qu’en dépit des affirmations de principe on a pu identifier les enseignants de l’école de base aux professeurs des écoles. C’est dans ce reste de diversité, soit dans le corps enseignant, soit dans les contenus enseignés ou dans les méthodes, que s’enracinent toutes les pratiques qui autorisent l’adaptation de l’école à des élèves qui, en dépit des dogmes pédagogiques, restent inégaux par leurs dons. Mais ce système ne survit et n’évite l’échec que par l’infidélité aux principes fondamentaux sur lesquels il repose. Dans cette élaboration d’un corps dogmatique constitué de principes qui blessent l’évidence la plus commune, un pas décisif a été franchi lorsqu’on a confondu le collège pour tous, qui est effectivement souhaitable, répondant à un allongement de la scolarité exigé par l’état technique de la société, et le collège unique. C’est faute d’avoir effectué de façon assez nette cette distinction qu’on sera porté à concevoir la prolongation de la scolarité obligatoire comme l’imposition d’une même forme d’école à tous les élèves pendant une période plus longue, confusion qui ne peut qu’être profitable aux dogmes de la correction pédagogique. La distinction du collège pour tous et du collège unique n’est vraiment établie que si on met en cause le premier dogme. En la matière les incertitudes de la pensée de René Haby ont eu des conséquences catastrophiques. Le résultat, c’est ce système éducatif où, faute d’avoir su créer une école adaptée aux capacités de chacun, on soumet tous au même régime de sorte que personne n’apprend plus rien ! D’ailleurs en matière de transmission des connaissances il y a un renoncement de l’école qui au nom du sixième dogme proscrit toute transmission d’un " acquis " classique, ce qui suscite l’opposition radicale de tout un courant communément désigné sous la rubrique de " gauche républicaine " (Debray, Kintzler, Finkielkraut, Coutel) (pp. 119-120). C’est parce que la correction pédagogique impose nécessairement le renoncement à la transmission des fondements de la culture classique qu’elle sera condamnée par certains bons esprits. C’est de là que viendra la révolte qui restaurera l’image du professeur de droite. Il n’est nullement besoin d’attendre le salut d’ailleurs et notamment d’une prétendue restauration de la loi du marché à l’école. N.B. : ce texte était sur le point d’être remis à notre imprimeur, lorsqu’il m’a été donné de prendre connaissance du dialogue publié dans le Figaro magazine de Bernard Kuntz et de Philippe Meirieu. La connaissance de cet intéressant et important document ne me conduit d’aucune façon à réviser mon appréciation. M.B. ETAT DES LIEUX D’UN COLLEGE PUBLIC Avec l’aimable autorisation de l’Association rhodanienne pour la liberté de l’enseignement nous reprenons de larges extraits d’un article publié dans la lettre de l’ARLE N° 39 par un professeur de collège d’un établissement public considéré comme dans la norme. ARLE 40 Montée Saint-Barthélemy 69005 Lyon Il semblerait que les établissements scolaires ne soient plus aujourd’hui des lieux d’études où ceux qui ont envie d’apprendre, apprennent. Il s’agit d’une sorte d’association floue où n’importe qui a son mot à dire et où tous les enfants, quels que soient leurs goûts et leurs compétences doivent entrer et rester coûte que coûte et cela jusqu’à seize ans. Peu importe ce qu’ils apprennent et comment ils l’apprennent ! L’essentiel est de les garder le plus longtemps possible et de retarder leur entrée dans la vie active. Un aperçu des multiples activités proposées dans un collège de notre grande Région et qui pourrait s’intituler : " de l’art d’occuper les enfants scolarisés " est révélateur à ce sujet. Les parents attendent normalement que le collège initie les enfants aux mathématiques, à la physique, aux sciences humaines, aux langues et notamment au français, à tout ce qui fait la substance même des études. Point du tout ! Aujourd’hui ces matières n’ont pas totalement disparu (fort heureusement !), elles sont noyées dans un flot d’activités annexes bien plus attrayantes pour l’enfant parce que plus ludiques et exigeant moins d’efforts. Un élève veut-il s’initier au bridge ? Qu’à cela ne tienne ! Un club de bridge est créé et les enfants peuvent s’y inscrire. Veut-il s’intéresser à l’analyse filmique ? Il en a aussi la possibilité. Désire-t-il suivre un parcours diversifié ? (un thème commun traité par des professeurs de disciplines différentes), des professeurs sont présents pour le guider. Songe-t-il à son avenir ? Des enseignants par le biais du " projet personnel de l’élève " sont là (non préparés d’ailleurs) pour l’entourer, le conseiller, le guider dans telle ou telle direction et prendre éventuellement à sa place des décisions lourdes de conséquences. L’enfant est-il perturbé, comme peut l’être un adolescent ? Aussitôt un professeur de sciences apparaît et l’initie à la sexualité ; il en profite même, s’il s’agit d’une adolescente, pour lui parler de la contraception ou de la pilule du lendemain. Et le SIDA me direz-vous ? Il semble qu’on l’ait oublié ! Vous n’y êtes pas ! Outre l’évocation de la maladie tout au long de l’année, une journée, pas moins, est consacrée à ce qu’on appelle " le Raid Sida ", c’est-à-dire que des enfants quittent leur établissement pour une destination donnée et doivent se repérer seuls dans les rues et ruelles d’une ville pour rencontrer des responsables, capables de répondre à leurs questions. Il n’est pas rare d’ailleurs de trouver le lendemain, jonchant le sol d’une salle de classe quelques préservatifs que des élèves ont laissé traîner et qui donnent lieu à des réflexions égrillardes. L’enfant veut-il faire des échanges avec des étudiants étrangers ? Il lui suffit de s’inscrire au projet " Comenius ". Désire-t-il s’initier à l’écriture théâtrale, à la musique, à la diététique ? C’est encore possible. Tout est possible ! Certains ont même pensé à l’éduquer au triage des déchets... Autre trouvaille délicieuse, à la rentrée 1999, sous l’instigation de Mme Royal, c’est la distribution en début d’année d’un journal pour chaque élève de sixième, journal reconnu par les intéressés eux-mêmes comme " débile " avec des questions du style : " c’est votre premier jour de classe à quelle heure vous êtes-vous levé ? " Ou " si vous étiez un oiseau, quel oiseau aimeriez-vous être ? Un insecte ? une libellule ? un grillon ? un papillon ? ". Ou encore, la création d’études encadrées confiées souvent à des jeunes incompétents qui osent transmettre aux élèves des inexactitudes en mathématiques ou en langues vivantes. Quel gâchis ! Notre éducation nationale, tant admirée autrefois dans le monde entier va très mal. Le navire fissuré prend l’eau de toutes parts et l’on n’arrive pas à colmater les brèches. Les enseignants se lamentent des baisses de niveau et finissent par en rire ou par se révolter. Que dire des élèves de sixième qui ne savent ni lire, ni écrire, ni compter couramment ? Qui ne savent pas faire la distinction entre un substantif et un verbe, un adjectif et un nom ? Que dire des élèves de troisième qui sont incapables de conjuguer correctement un verbe du premier groupe au passé simple, de distinguer un complément d’objet direct d’un sujet inversé ? Que penser d’un élève qui passe d’une classe à l’autre, jusqu’en troisième parce que plus personne ne sait quoi lui proposer ? Le plus simple est évidemment de s’en débarrasser en le poussant vers la sortie. De son avenir on n’en a cure ! Quant à orienter un enfant, cela relève de la quadrature du cercle. Les conseils de classe ne servent pratiquement à rien puisque les professeurs n’ont aucun pouvoir de décision. Par ailleurs, diriger un enfant qui ne possède pas les bases élémentaires du savoir lire et écrire relève du miracle. Les apprentis ont eux aussi besoin de ces bases simples mais solides et du goût du travail bien fait. Or les enfants, depuis leur entrée à l’école n’ont jamais fourni le moindre effort. Tôt ou tard ils sont assurés de continuer leur cursus scolaire même s’ils en sont incapables. Là est l’échec de la nouvelle éducation nationale qui a perdu son objectif principal : apprendre l’effort, la volonté, le courage et le dépassement de soi. Il est évident que ces élèves en perdition, pendant des journées entières assis sur une chaise à écouter des professeurs leur proposer des sujets qui les indiffèrent, se sentent humiliés chaque fois un peu plus par les zéros obtenus et les critiques permanentes dont ils font l’objet. Alors arrive la violence verbale, puis physique, simple d’abord puis plus grave, comme tel élève qui a contraint un de ses camarades à manger des excréments, comme tel autre qui, désireux de se faire de l’argent de poche, a vendu au collège des pistolets à grenailles, comme tel autre enfin qui a donné un coup de poing à son professeur de mathématiques. Ce ne sont pas, à l’évidence, des éducateurs ni des " emplois jeunes " qui feront disparaître cette violence. Il faut pouvoir trouver pour ces jeunes en situation d’échec d’autres structures, capables de les accueillir afin qu’ils puissent s’épanouir et envisager un avenir à la mesure de leurs compétences. Que ceux qui nous gouvernent évitent de jeter de la poudre aux yeux avec des inventions creuses et prétentieuses qui fabriquent de l’illusion. Il serait souhaitable d’abandonner cette école à tronc commun unique sur laquelle beaucoup de non-enseignants se permettent d’agir et de conseiller. La pédagogie est un métier qui ne se réalise pas avec de bons sentiments démagogiques, mais avec une bonne dose d’objectivité, de compétences et d’honnêteté intellectuelle. Tweet |