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Lettre N° 16 - MARS 1986-1987 PREMIER BILAN POUR LA LIBERTÉ DE L’ENSEIGNEMENT (4)
Les engagements de la plate-forme R.P.R.-U.D.F. signés le 16 janvier 1986 comportaient les points suivants : "Bâtir l’école de demain : cette tâche à tous égards prioritaire exige qu’il soit mis un terme dans les plus brefs délais aux querelles d’un autre âge qui divisent inutilement les esprits et paralysent les initiatives (...). Le rôle de l’État n’est pas de tout régir par lui-même mais de se porter garant en permanence de quelques principes essentiels. L’État est garant de la Liberté d’Enseignement : la protection constitutionnelle de la Liberté d’Enseignement sera renforcée afin de garantir aux parents le droit d’inscrire leurs enfants dans l’établissement public ou privé de leur choix sans restriction ni discrimination financière dans l’aide apportée par l’État aux établissements. Afin que cette liberté se traduise concrètement dans la réalité, l’État veille à ce que les établissements privés, dans le cadre de leur caractère propre, disposent de l’autonomie de gestion, déterminent leurs projets éducatifs et choisissent leurs maîtres, qui bénéficieront d’un statut spécifique (...)". "La liberté pour chaque parent de choisir l’école de ses enfants implique que soient progressivement modifiées les dispositions, notamment en matière de sectorisation, qui font actuellement obstacle à une réelle pluralité et à une réelle diversité des établissements d’enseignement. Ces derniers pourront, dans une très large mesure, adapter les formations dispensées aux besoins des élèves et de l’environnement. Les établissements d’enseignement supérieur seront pleinement autonomes et délivreront leurs propres diplômes (suppression de la loi SAVARY, possibilité de création d’établissements privés d’enseignement supérieur)". La Commission Juridique des Comités de Vigilance pour la Liberté de l’Enseignement a fait le bilan suivant des mesures effectivement prises. 1. Renforcement des garanties constitutionnelles de la Liberté de l’Enseignement Cet engagement n’a pas été tenu et le Ministre de l’Éducation Nationale a répondu, aux parlementaires qui le lui rappelaient, que les garanties constitutionnelles actuelles étaient suffisantes. 2. Libre choix des maîtres et statut spécifique Les dispositions législatives n’ont pas été modifiées pour garantir à nouveau le libre choix des maîtres. Le Gouvernement a renoncé provisoirement au projet de décret établi fin 1986 pour corriger le décret du 12 Juillet 1985, après avoir constaté qu’il était techniquement nécessaire de modifier ce décret ! Une simple circulaire a été prise le 30 Janvier 1987 qui n’apporte ni aux chefs d’établissement ni aux maîtres les garanties qu’ils étaient en droit d’attendre. Les accords professionnels de réemploi des maîtres internes à l’enseignement privé ne sont toujours pas reconnus et le libre choix des maîtres par le chef d’établissement n’est toujours pas garanti. 3. Subventions des collectivités locales aux dépenses d’investissement Bien que condamnées par deux arrêts du Conseil d’État rendus le 19 Mars et le 19 Décembre 1986, la circulaire n° 85-105 du 13 Mars 1985 et la circulaire interministérielle n° 85-151 du 20 Juin 1985 n’ont toujours pas été abrogées ou modifiées. En revanche, la loi n° 86-977 du 19 Août 1986 (article 19) est venue autoriser les communes à consentir des garanties d’emprunt aux établissements privés du premier degré, sous contrat ou non, pour leurs dépenses d’investissement, ou accorder à ces mêmes établissements, lorsqu’ils sont sous contrat, les subventions pour l’acquisition des matériels informatiques complémentaires (sans dépasser les subventions accordées aux écoles publiques). Ce texte a été voté à la suite d’un amendement de sénateurs de la majorité beaucoup moins restrictif, puisqu’il avait pour effet de mettre fin à l’interdiction archaïque et anachronique des subventions des collectivités locales aux dépenses d’investissement des établissements privés du premier degré. Mais après avoir accepté cet amendement devant le Sénat, le Gouvernement s’y est opposé devant l’Assemblée Nationale. 4. Crédits budgétaires pour les emplois de maîtres La Loi de Finances rectificative 1986 a ajouté 400 nouveaux emplois aux 438 nouveaux emplois prévus par la Loi de Finances 1986, votée fin 1985 (alors que 1.500 nouveaux emplois étaient nécessaires). La Loi de Finances 1987 a prévu 670 nouveaux emplois, alors que 800 nouveaux emplois sont nécessaires. L’étranglement financier des établissements privés sous contrat s’est donc desserré mais le nombre de postes enseignants demeure insuffisant. Le dispositif législatif et réglementaire d’étranglement financier de l’enseignement privé mis en place par le précédent Gouvernement est toujours en vigueur même s’il n’est plus appliqué avec la même rigueur. Aucune instance nationale indépendante n’a été instituée pour une évaluation objective des besoins constatés et des crédits nécessaires. Ni l’article 119 de la Loi de Finances 1985 ni les circulaires n° 85-103 et 85-104 du 13 Mars 1985 n’ont été corrigés. Le Ministère a conclu au rejet des recours demandant au Conseil d’État d’annuler ces circulaires et les a mêmes aggravées par une circulaire du 29 Janvier 1987 qui a dû faire l’objet de nouveaux recours en Conseil d’État. 5. Dépenses de fonctionnement (forfait d’externat) Le Gouvernement a fait réévaluer la dotation budgétaire qui devait couvrir la part des dépenses de fonctionnement prise en charge par les régions et départements qui étaient déficitaires de 255 millions de francs pour 1987. Le Gouvernement a d’autre part fait réévaluer la part des dépenses de fonctionnement prise en charge par l’État qui est apparue déficitaire de 701 millions de francs pour la seule année scolaire 1986-1987 (et de 3,4 milliards de francs pour l’arriéré accumulé depuis 1983). Mais les crédits restent à débloquer. D’autre part, la législation n’a toujours pas été corrigée en ce qui concerne la prise en charge des dépenses de fonctionnement correspondant aux élèves domiciliés dans d’autres communes que la commune où se trouve l’établissement fréquenté. Ces dépenses ne sont actuellement ni à la charge de cette commune ni à la charge des communes de résidence, sauf accord amiable facultatif entre les communes. 6. Enseignement supérieur libre Le Gouvernement n’a donné aucune suite aux différents projets législatifs visant à garantir le libre choix d’un établissement d’enseignement supérieur sans pénalisation financière. Cette pénalisation n’est que très faiblement atténuée par des subventions du Ministère chargé de l’Enseignement Supérieur. Le projet de budget 1987 prévoyait la reconduction sans augmentation des crédits dérisoires affectés à ces subventions (soit 55 millions correspondant à 3.000 à 4.000 francs par élève et par an pour les cinq facultés libres catholiques et 600 francs par élève et par an pour les 19 écoles d’ingénieurs catholiques). Mais, à la suite d’interventions parlementaires, le Gouvernement a finalement accepté de porter ces crédits de 55 à 70 millions de francs (portant les subventions de l’Etat aux écoles d’ingénieurs de 600 francs à 3.000 francs par élève et par an, pour des scolarités de 11.000 à 18.000 francs par élève et par an). Le Gouvernement a d’autre part accepté l’élargissement des possibilités de déduction du bénéfice imposable des dons effectués par les entreprises assujetties à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés, au profit des établissements d’enseignement supérieur publics et privés (sans but lucratif), dans la limite de 2 p. 1.000 du chiffre d’affaires (article 4 de la Loi de Finances pour 1987). Mais, contrairement à une "idée forte" du Gouvernement en matière de politique fiscale, les établissements privés doivent être agréés par le Ministre chargé de l’Enseignement supérieur et le Ministre chargé du Budget. Ce système de l’agrément avait pourtant été vivement et pertinemment critiqué par M. Alain JUPPE, Ministre délégué au Budget, le 18 Novembre 1986 au Sénat, mais à propos de l’amendement "COLUCHE"... 7. Enseignement agricole Les décrets nécessaires à l’application du régime de contrat institué en faveur des établissements privés d’enseignement agricole par la loi n° 84-1285 du 31 Décembre 1984 n’ont toujours pas été pris, plus de deux ans après que le Parlement eut voté cette loi, pratiquement à l’unanimité. 8. Carte scolaire Le Gouvernement a poursuivi la politique engagée sur ce point par son prédécesseur. Le "libre choix" des familles est devenu un "choix préférentiel" entre 3 à 5 établissements scolaires publics d’un même secteur. Mais les établissements "cotés" et ceux qui ont trop mauvaise "réputation" en sont exclus. Tweet |