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Lettre N° 62 - 4ème trimestre 1998
LA MORTE-SAISON Comme tous les deux ans depuis 1990, la remise du Prix bisannuel et l’assemblée générale ordinaire d’Enseignement et Liberté, suivie cette année d’une assemblée extraordinaire, se sont tenues au palais du Luxembourg, le 24 octobre. Nous donnons dans ce numéro l’essentiel du rapport moral du président, du rapport financier, les résolutions votées lors de ces assemblées générales ainsi que la présentation de l’ouvrage de M. Sylvain Bonnet, par M. Jean Cazeneuve, président du jury, et la réponse du lauréat. Nous publierons prochainement les conférences de Mme Geneviève Zehringer, présidente de la société des agrégés de l’Université, sur le rapport Meirieu et la réforme des lycées, et de M. Jacques Lévy, directeur de l’école des mines de Paris, sur le rapport Attali, l’avenir des grandes écoles et des classes préparatoires, données le même jour. Lorsque ces textes vous parviendront, très vraisemblablement la situation aura peu évolué, car malgré l’aspect bouillonnant de son discours, M. Allègre ne semble pas manifester une grande célérité dans la solution des problèmes. De sorte que je prends le pari que les textes que nous présentons ne seront aucunement caducs lorsque nous les publierons dans cette Lettre. Aucune des questions qu’ils posent n’aura trouvé de réponse d’ici là. C’est le projet de réforme des lycées présentée à l’issue du colloque Meirieu, projet que Mme Zehringer soumet à une analyse critique très documentée, qui a suscité l’émoi des lycéens, plus ou moins encadrés et soutenus par une bonne partie de leurs professeurs. De là a résulté une agitation assez gênante, qui a traîné en longueur et désorganisé la vie scolaire au premier trimestre. Malgré les efforts des organisations à sa dévotion, le ministre n’a jamais pu maîtriser la situation de façon satisfaisante. Mais le caractère indéterminé des revendications des lycéens, qui se contentaient de demander en vrac plus de professeurs, de meilleures conditions d’études et des allégements de programmes, rendait impossible une issue du conflit qui équivaudrait à un " protocole d’accord ". M. Allègre n’est pas sorti grandi de cette épreuve. La vacuité d’un bon nombre de ses propositions, l’inefficacité de la plupart des remèdes qu’il propose sont apparus en pleine clarté, et surtout aux yeux des lycéens. Mais, avec quelques créations d’emplois, quelques aménagements de programmes qui se payeront par un peu plus de dépenses (et donc d’impôts) et encore un abaissement du niveau, il a pu se tirer provisoirement d’affaire. De même que c’est aujourd’hui seulement qu’on constate que la présence d’emplois-jeunes dans l’éducation nationale ne constitue pas une panacée, car on ne sait comment utiliser ces jeunes sans formation, de même c’est seulement dans quelque temps que le bilan des décisions qui ont été prises sera établi. Quant aux attaques contre les grandes écoles et contre ces classes préparatoires dont l’élitisme constitue l’une des cibles favorites de Claude Allègre, elles ont donné lieu à une riposte ardente de leurs défenseurs : pour être brève (car on a un souci particulier des élèves dans ce milieu), la grève des professeur a été très massivement suivie. Ainsi la démonstration était faite - et le soutien de personnalités particulièrement éminentes le confirmait - que si M. Allègre persistait dans ses intentions l’affaire ne serait pas de tout repos pour lui. On ne s’étonnera donc pas si tout est calme sur ce front, mais naturellement on ne saurait rien préjuger à partir de cette accalmie. Les deux problèmes majeurs qui marquèrent la situation jusqu’à la Toussaint n’ont donc nullement évolué. Depuis, aucune donnée marquante si ce n’est une initiative qui n’a pas vraiment retenu l’attention. Sous prétexte de lutter contre les sectes, on renforce les exigences relatives à l’instruction des enfants élevés dans des établissements privés hors contrat (qui ne sont pas une rare exception, contrairement à ce qu’on croit) ou dans leur famille. Ce ne sont plus seulement les connaissances acquises en français et calcul, mais plus généralement l’éducation, le développement de la personnalité et la préparation à " l’exercice de la citoyenneté " qui seront contrôlés. Les parlementaires portés naturellement à retrouver l’unanimité lorsqu’il s’agit de faire une imbécillité n’ont pas hésité à approuver ces dispositions. Il suffit de parler de lutter contre les sectes pour leur imposer le silence. Il semble que personne n’ait encore songé à remarquer qu’un gouvernement malveillant pourrait utiliser contre la liberté de l’enseignement un texte si chaleureusement accueilli par Mme Royal. Bien sûr, ce n’est pas le secrétariat national de l’enseignement catholique qui en fera la remarque. Hors des contrats, point de salut.
Grâce à la généreuse bienveillance de la Présidence du Sénat, nous pouvons tenir au palais du Luxembourg une assemblée générale ordinaire de notre association, qui sera suivie d’une assemblée extraordinaire. Ensuite, nous entendrons deux conférences sur des sujets d’actualité, données par des personnalités particulièrement compétentes, que nous remercions vivement de leur venue. Enfin, avant de clore la réunion, M. Jean Cazeneuve, membre de l’Institut, président de jury, procédera à la remise du prix d’Enseignement et Liberté. Une fois de plus – la cinquième fois en huit ans – nous devons exprimer au Bureau du Sénat toute notre reconnaissance pour la sollicitude qu’il nous marque en mettant à notre disposition les locaux dans lesquels nous allons passer l’après-midi. Il y a deux ans presque exactement, à guère plus d’une dizaine de jours près, dans le précédent rapport moral, j’avais déploré que, malgré ses intentions louables et la parfaite estimation de la situation qu’il manifestait, M. Bayrou, depuis longtemps ministre, n’ait pas mis le temps à profit pour assurer la liberté de l’enseignement privé et améliorer le fonctionnement du service public. J’étais alors bien imprudent de dénoncer l’inertie ministérielle. Juste quelques mois plus tard, une dissolution, dont je me contenterai de dire qu’elle était imprévue du commun des mortels, déterminait un changement de majorité et portait M. Claude Allègre au ministère de l’Éducation nationale. Peu connu du grand public – il n’est pas membre de parlement, notamment – M. Allègre s’était fait remarquer de milieux plus restreints comme conseiller de M. Jospin et en réalité comme principal inspirateur des réformes entreprises par celui qui était alors ministre de l’Éducation. Les objectifs que poursuit M. Allègre ne pouvaient donc aucunement surprendre. Comme il est nature, il s’agissait de reprendre ce qui avait été décidé dans les grandes lignes et édicté par M. Jospin lui-même. Il s’agirait seulement de compléter et d’appliquer ces décisions. Ce qui, en revanche, surprendra, c’est le rythme et l’ordre des mesures prises, ainsi que le style à la fois brutal et démagogique du nouveau ministre, qui lui vaudra une étrange popularité. Dès la première rentrée des classes qu’il doit assurer, M. Allègre s’en prend au corps enseignant, qui abuserait des congés de formation – que M. Jospin et les autres ministres socialistes ont fortement contribué à institutionnaliser – et des congés de maladie, "qui ne sont pas un droit" soutient-il, avançant des chiffres de taux d’absence manifestement faux, comme il l’avouera plus tard. En même temps, il manifeste sa volonté de rogner sur les vacances des enseignants et d’accroître leur charge de travail. Tout ceci s’accompagne de considérations sur la nécessaire modernisation apportée par le Minitel, l’Internet, qui dispenseraient en quelque sorte de savoir lire et écrire, sous réserve qu’on connaisse la langue anglaise ! Ces propos, d’ailleurs réitérés avec diverses variantes, constituaient une déclaration de guerre aux syndicats d’enseignants, notamment au SNES-FSU, dominant dans le second degré, qui apparaît rapidement comme le premier visé lorsque M. Allègre affirme qu’il faut mettre fin aux pratiques de "cogestion" entre l’administration et les syndicats, pratiques qui profitaient surtout à ce syndicat. Si on ajoute que la "déconcentration" est tout de suite inscrite au nombre des objectifs ministériels et qu’elle pourrait nuire à son pouvoir, on doit conclure que les hostilités étaient ouvertes dès l’arrivée de M. Allègre rue de Grenelle. Initialement, cette attitude devait valoir à M. Allègre la sympathie et l’indulgence de nombreux parents, même parmi ceux qui s’affirment plus proches politiquement de l’opposition que de la gauche : c’est qu’il savaient d’expérience qu’il y a un nombre appréciable d’enseignants incompétents ou désinvoltes ; ils étaient heureux de voir un ministre qui ne se fait pas le défenseur inconditionnel des professeurs. Aussi, il nous a été nécessaire de procéder à un travail d’explication, comme on dit dans certains milieux. A partir du moment où on porte l’attention, non au style, mais aux objectifs de la politique ministérielle, il est clair que nous ne pouvons qu’être radicalement opposés à ces objectifs, comme nous avons essayé d’en convaincre nos lecteurs. On s’étonnera de voir un ministre de la gauche plurielle prendre comme adversaire un corps enseignant qui vote massivement à gauche et le plus pesant des syndicats du secondaire. Mais tout s’explique si on suppose que pour M. Allègre la situation lamentable du système éducatif vient des obstacles qui ont empêché l’application de la politique dessinée par M. Jospin, notamment dans sa loi d’orientation de 1990. Ces obstacles ont été multipliés par l’opposition de diverses organisations à la fois corporatistes et conservatrices. Encore plus que le SNALC – le plus important des syndicats non-marxistes du secondaire – conservateur qui doit avoir aux yeux de M. Allègre l’avantage de jouer franc jeu, la bête noire, ce sera le SNES-FSU, dont on sait que sa direction est fortement influencée par des éléments communistes, et qui masquerait sous un progressisme de façade une bonne dose de conservatisme et de corporatisme. Seuls trouvent grâce à ses yeux le syndicat fédéré à la CFDT (très à gauche pédagogiquement) et une petite organisation née d’une scission du SNES ; mais à eux deux ces syndicats ne représentent guère plus de 20 % des enseignants du secondaire. C’est donc en brisant en priorité les résistances qu’il rencontre dans son propre camp syndicalo-politique que le ministre entend imposer ses volontés. Les reproches de corporatisme et de conservatisme adressés à ceux qui sont du même côté de l’échiquier politique que lui ne sont pas totalement dénués de fondement. Mais enfin, la fonction d’un syndicat n’est-elle pas de défendre ses mandants ; à ce titre, son action ne peut être totalement dépouillée de toute trace de corporatisme. Quant à l’accusation de conservatisme, elle est portée contre tous ceux qui, parce qu’ils estiment avec réalisme la situation, ne sont pas disposés à faire table rase du passé. Ce qui, pas à pas, va ruiner la réputation favorable de M. Allègre, c’est son incapacité de résoudre les problèmes les plus brûlants auxquels il est affronté. L’interminable grève des enseignants de la Seine-Saint-Denis qui ne peuvent exercer leur métier en raison de la violence qui paralyse lycées et collèges l’a beaucoup desservi. Alors qu’en quelques années le nombre d’incidents a été multiplié par dix, il ne trouve à proposer comme remède que l’augmentation du nombre de classes de ZEP. Les promesses non tenues vont également le compromettre. A l’entendre, grâce à ses soins, la dernière rentrée s’était déroulée dans de bien meilleures conditions que les précédentes. Or, que découvre-t-on ? Un mécontentement général des élèves, des professeurs, des chefs d’établissement, fondé dans de nombreux cas sur des données objectives indéniables, mais dans d’autres sur des demandes abusives (par exemple, les classes ne sont pas aussi surchargées qu’on veut bien le dire). Pourquoi nous avoir trompé sur la qualité du résultat obtenu par sa gestion ? Enfin, pourquoi ce ministre qui prétendait disposer d’une panoplie de remèdes souverains, au premier rang desquels figurait la "déconcentration", n’a-t-il pas accélérée leur mise en application ? Ce terme prononcé par M. Allègre comme s’il était son invention propre, je l’ai entendu utiliser en 1986 par M. Monory lorsque le tout nouveau ministre de l’Éducation avait reçu une délégation de notre association : il entendait par là le fait de confier au niveau local toutes les décisions qui peuvent l’être sans remettre en cause le statut des enseignants ou le caractère national des programmes, ce en quoi elle se distinguait d’une radicale régionalisation. J’ose espérer que douze ans après, l’actuel ministre a une conception aussi nette de cette déconcentration dont il parle souvent, sans la mettre en train. Les Français ont fini par remarquer que M. Allègre avait tendance à se payer de mots. Tous ces éléments ont sapé une popularité facilement acquise tandis que les projets de réforme, toutes entreprises simultanément, mais jamais conduites à leur terme, ni évaluées, concernant à peu près l’ensemble des facettes de la vie scolaire – à l’exclusion des universités proprement dites, vraisemblablement tenues pour assez fatiguées par les traitements auxquelles elles avaient été soumises – ont donné le sentiment d’une instabilité générale qui a fini par lasser. La plus connue, la plus avancée de ces réformes est celle des lycées, préparée par un questionnaire adressé aux élèves et aux professeurs de ces établissements et dont les conclusions, d’une validité et d’une signification douteuses, ont été présentées lors du colloque Meirieu qui s’est tenu à la fin du mois d’avril à Lyon. C’est elle qui vient de mettre le feu aux poudres, d’autant plus que M. Allègre avait fait croire que les réformes proposées seraient immédiatement appliquées et efficaces, ce que les lycéens ont perçu comme une tromperie. (Soyons assurés que la première mesure appliquée sera ces fameuses réductions de programme qui ne coûtent rien !) La seconde est une reforme des grandes écoles qui s’inspirerait du rapport rédigé par Jacques Attali et qui mettrait en cause le statut des classes préparatoires tenues pour un repaire de l’élitisme. Le projet est ici moins avancé. Je ne parlerai ni de l’une, ni de l’autre de ces réformes pour la simple raison que nous avons invité des personnalités particulièrement qualifiées pour en parler. Mais l’erreur serait d’oublier que d’autres projets ont été mis en chantier. Je citerai d’abord "la charte pour bâtir l’école du XXIe siècle" qui, sous ce titre pompeux semble n’être qu’un projet d’expérience de l’INRP (Institut national de la recherche pédagogique) pour une nouvelle organisation de l’école primaire, expérience toutefois à conduire sur 2 000 écoles au moins. Je noterai simplement que ce document se désintéresse des contenus de cet enseignement, qui n’aurait pas à être complet puisque la scolarité en collège jusqu’à seize ans est elle aussi obligatoire, qu’il multiplie les intervenants en plus des professeurs des écoles, comme si le budget de l’Éducation nationale qui est déjà passé de 200 à 350 milliards en dix ans était infiniment extensible, et qu’enfin le souci majeur semble être une volonté tenace d’arracher l’enfant à sa famille, puisqu’on présente comme un modèle idéal un temps continu d’école de 8 h 30 à 16 h 45 ou 18 h. Enfin pour faire la jonction avec la réforme des lycées, la présentation au mois de juillet par Mme Royal d’un audit sur les collèges confié à des experts dirigés par le sociologue François Dubet. Rien de très original dans les résultats de cet audit : on y constate la diversité des collèges qui ne seraient pas tous effondrés, mais on note que c’est le plus souvent au prix d’une diversification des filières contraire aux textes. On déplore alors que, si le principe des filières est admis et s’il n’y a plus de filières dissimulées en sixième, il en aille tout différemment en quatrième et troisième : le jeu des options linguistiques ou de classes dites européennes permet d’"homogénéiser" les classes à ce niveau. Au nom de principes d’égalités, ce sont ces pratiques qu’il faut éviter, même si ce sont les entorses aux principes qui ont permis à de nombreux collèges de surnager : "il faut réaffirmer le principe de la carte scolaire et limiter les dérogations" ; les journaux télévisés nous apprennent qu’on travaille à le faire. Bel exemple d’acharnement idéologique. Le rapport Meirieu ne fait d’ailleurs après tout que proposer une extension au lycée des principes qui régissent le collège, dans la mesure du possible. Et l’enseignement privé dans tout cela ? Aucune décision ne le concerne directement. Son statut est préservé, mais naturellement amélioré. Mais du fait qu’il constitue la seule échappatoire à un système uniformisateur presque jusqu’au baccalauréat, il est, sans l’avoir cherché, bénéficiaire de la situation. Ce qui ne justifie pas la bruyante approbation apportée par l’UNAPEL à M. Meirieu. Que pouvait-on faire contre ce rouleau compresseur qui n’hésitait pas à réduire au rôle de figurants et à priver de parole dans les colloques officiels les représentants de respectables organisations ? Mettre en pleine lumière à travers notre lettre les intentions et les méthodes d’un ministre qui avait essayé de capter les faveurs d’un public qui lui était habituellement rebelle. Deux exercices se sont écoulés depuis notre précédente assemblée, le 9 novembre 1996. En 1996, les recettes ont été de 573 000 F, dont 27 000F de produits financiers, les charges de 745 000 F, dont 55 000 F pour le prix attribué cette année et le colloque tenu le jour de sa remise. L’exercice s’est traduit par une perte de 171 000 F. En 1997, les recettes n’ont été que de 378 000 F, dont 14 000 F de produits financiers. Les charges de l’exercice ont été de 721 000 F, avec une perte de 343 000 F. Au 31 décembre 1997, les réserves s’élevaient à 342 000 F. Cette augmentation des pertes, après celles enregistrées en 1994 et 1995 résulte d’une diminution des recettes, avec un maintien des charges à leur niveau antérieur. La diminution des recettes résulte essentiellement de celle du nombre de cotisants, au rythme de 10% en moyenne chaque année. C’est ainsi que les 364 000 francs de cotisations abonnements et dons de 1997 sont à comparer aux 450 000 francs de 1995, les années impaires étant toujours moins bonnes que les années paires qui bénéficient des manifestations telles que celle qui nous réunit aujourd’hui. En ce qui concerne les charges, leur maintien au même niveau résulte de la proposition qui avait été faite par le conseil et approuvée par l’assemblée du 9 novembre 1996 de conserver notre organisation dans son état, tant que le niveau des réserves le permettrait. Les résultats de 1997 ont montré que ce n’était plus le cas. Nos dépenses étant constituées pour environ 60% par les achats nécessaires à la diffusion de notre lettre trimestrielle et à l’envoi des courriers aux adhérents et, pour 40%, au salaire de notre délégué et aux charges sociales correspondantes, nous avons dû procéder à son licenciement, effectif au 30 juin de cette année. Cependant, le départ à la retraite de votre président, la fin de l’activité salariée de votre délégué leur permettent de continuer à assurer l’activité de votre association comme vous pouvez le constater aujourd’hui à condition que vous vouliez bien leur accorder quelque indulgence pour la façon dont ils assument les tâches de secrétariat dans lesquelles ils sont novices. Cependant l’équilibre de nos comptes demandera un effort supplémentaire, par la recherche de nouvelles économies mais aussi par un effort des adhérents, effort de générosité mais aussi effort de rapidité dans leur réponse à nos appels. À la suite du débat, les résolutions proposées par le conseil d’administration ont été adoptées à l’unanimité par l’assemblée. Elles portaient sur : • le quitus de leur gestion aux administrateurs, • le renouvellement pour quatre ans des mandats d’administrateurs de MM. Roland Drago, Claude de Flers et Pierre Magnin, • la ratification de la cooptation de M. Jacques Narbonne, conseiller d’Etat honoraire, • l’autorisation donnée au conseil d’administration d’ouvrir à nouveau des concours en vue de l’attribution de prix, avec une dotation de 100.000 francs, et d’une bourse de 50.000 francs à l’auteur d’un manuel scolaire. ASSEMBLEE GENERALE EXTRAORDINAIRE Rapport du conseil d’administration Nous vous avons réunis en assemblée générale extraordinaire afin de vous proposer de modifier, en le simplifiant, l’article cinq de nos statuts qui fixe les catégories de membres de notre association. Nos statuts en distinguent trois grandes catégories : • les membres actifs, répartis eux-mêmes en cinq catégories, selon le montant de leur cotisation, avec un minimum qui est actuellement de 250 F. Les membres actifs sont membres de droit de l’assemblée générale. • les membres associés qui versent une cotisation dont le montant est actuellement de 50F. • les membres d’honneur. La distinction faite par nos fondateurs entre membres actifs et membres associés avait pour objectif de permettre la réunion d’une assemblée générale rapidement et pour un coût modéré, si le besoin s’en faisait sentir. La distinction ainsi faite entre ceux qui participent de droit à l’assemblée générale et ceux qui y participent sur invitation ne semble pas pertinente, à l’usage, puisque les uns et les autres ont toujours été conviés jusqu’à présent. La répartition des membres actifs en cinq catégories avait pour objet de proposer une sorte de barème à ceux qui nous apportaient leur soutien et de les mettre à l’abri des critiques de l’administration fiscale, qui admettait sans discuter à l’époque que les cotisations fussent déduites du revenu imposable et le contestait parfois pour les dons. Cette répartition a également perdu sa justification, puisque l’administration fiscale refuse au contraire maintenant de prendre en compte les cotisations, au motif qu’elles ont une contrepartie, en ne retenant que les seuls dons. La résolution suivante a ensuite été adoptée à l’unanimité : Résolution L’assemblée générale extraordinaire, après avoir entendu la lecture du rapport du conseil d’administration ,décide de substituer à l’actuel article cinq des statuts la rédaction suivante l’association se compose : 1) de membres actifs, personnes physiques ou morales intéressées à la réalisation des buts de l’association, qui adhèrent aux présents statuts, sont agréés par le conseil d’administration et versent une cotisation annuelle dont ce dernier fixe le montant. 2) de membres d’honneur (le reste sans changement)
REMISE DU CINQUIEME PRIX D’ENSEIGNEMENT ET LIBERTE Jean Cazeneuve Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l’association Enseignement et Liberté, présidée par Maurice Boudot avec la précieuse collaboration de Philippe Gorre a créé un prix bisannuel destiné à récompenser l’auteur d’un ouvrage qui contribue à la défense de la liberté d’enseignement et à son exercice dans la société actuelle. Le jury que j’ai l’honneur de présider a eu la grande douleur de perdre cette année un de ses membres, le très regretté Lucien Gorre, qui était d’ailleurs un des fondateurs d’Enseignement et Liberté. Le jury maintenant comprend, avec moi, mon confrère Roland Drago, membre de l’Institut et les professeurs Yves Durand, Pierre Magnin et Armel Pécheul, tous trois recteurs chanceliers honoraires. Le jury a décidé unanimement de décerner le prix 1998 à M. Sylvain Bonnet, auteur d’un livre intitulé PROF et publié aux éditions Robert Laffont. L’auteur est lui-même " prof " et , plus précisément, agrégé de lettres classiques, il enseigne en Normandie dans un collège des environs de Bayeux. Il aime son métier, mais doit affronter dans cet établissement et plus particulièrement dans la classe de quatrième technique, des élèves plutôt turbulents. Il ne s’agit pas d’un établissement à problèmes, ni même d’une banlieue spécialement difficile ; il nous parle, et c’est un des intérêts du livre, d’une population scolaire qui n’est pas celle dont on rend compte dans les médias, quand il y a eu des actes de violence. Dans cette classe on ne relève ni l’usage ni le commerce de la drogue, ni d’actes de délinquance à proprement parler. Il s’agit là d’élèves qui sont issus de famille normales, dont les pères, la plupart du temps, ont des emplois, mais où les parents ne s’occupent guère de leurs enfants, les laissant sans éducation. L’auteur nous décrit leur grossièreté d’une façon tout à fait détachée, et avec beaucoup de talent. Le récit est tout à fait vivant, ce qui fait d’ailleurs que son livre est agréable à lire et se lit même avec passion. Que font ces élèves ? Ils crachent par terre, c’est la grande mode. Et pendant la classe, ils interpellent le professeur, ils se lancent des injures, avec des mots très crus, sans aller jusqu’à la violence. Que peut-on faire dans un tel cas ? L’auteur du livre a essayé plusieurs choses qui n’ont pas toujours été sans résultat, mais cela est toujours difficile. Il s’agit là d’un cas, sans doute plus répandu qu’on ne le croit, parce que l’on n’en parle pas, en l’absence de violence caractérisée. Un des grands intérêts de ce livre est de nous révéler l’existence de cette population scolaire. Ces jeunes, mal élevés et grossiers, ne s’intéressent pas du tout aux études, n’aiment pas la lecture, maîtrisent mal le langage. Il s’agit, dans le cas de cette quatrième, de ce que l’on appelle généralement une classe dépotoir, certains, mais nous ne les suivrons pas, disent même une classe poubelle. Ces jeunes n’ont probablement aucun avenir scolaire. M. Bonnet ne se contente pas de décrire fort bien ce qui se passe dans ce collège, il cherche aussi à détecter les causes du mal et proposer éventuellement des moyens pour corriger cette situation. Il s’intéresse en particulier au problème de l’orientation et surtout s’alarme du fait que l’on a cessé de valoriser la réussite scolaire, comme si cela était exigé par une sorte de démagogie égalitariste ; il critique aussi le principe du collège unique. En définitive à la fois par ce qu’il nous apprend, par ses diagnostics, par les propositions qu’il fait pour améliorer la situation, ce livre méritait bien le Prix que je vais avoir le plaisir de lui remettre au nom d’Enseignement et Liberté. Sylvain Bonnet Je vous exprime toute ma reconnaissance. Lorsque j’ai commencé à écrire, je ne m’attendais pas du tout à me retrouver ici, face à vous. Je réagissais à une nécessité personnelle, ayant découvert brutalement, parce que je venais d’un établissement beaucoup plus protégé que celui que je fréquente actuellement, une certaine forme de souffrance scolaire. J’ai éprouvé le besoin d’exprimer des situations que je jugeais insupportables, non pas seulement pour moi, mais pour les élèves qui s’y trouvaient plongés. Après la phase d’écriture et son aboutissement à quelque chose qui me semblait avoir un sens et être présentable, ce livre m’a permis de faire l’expérience des relations avec un éditeur, en la personne de Bernard Fixot, et avec une maison d’édition, et celle de la fréquentation des médias. L’attribution de ce Prix est une grande satisfaction. Dans la situation que je continue à vivre actuellement, étant toujours dans le même établissement et les choses ne s’étant pas arrangées - je pourrais même dire qu’elles vont de mal en pis, parce qu’aucune solution véritable ne peut être apportée dans l’état actuel de notre organisation - ce Prix est pour moi une raison d’espérer. Je vous en remercie infiniment.
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