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Françoise Ansart de Lessan
Mercredi matin j’ai écouté avec beaucoup d’intérêt sur Europe 1 votre conversation avec Yves Calvi à propos des nouveaux programmes du collège. Votre responsabilité de président du Conseil national des programmes donnait un certain poids à votre intervention. Je retrouve aujourd’hui dans " Le Point " l’essentiel de ce que vous avez dit à la radio.
Dans ce que vous dites, deux points m’ont particulièrement intéressée : l’apprentissage de la lecture et la dictée que vous faites faire chaque jour à votre fille.
Sur Europe 1 Yves Calvi vous a parlé du niveau des élèves et vous avez reconnu que le niveau en français (grammaire, orthographe et lecture) n’était pas bon. Vous avez rassuré les auditeurs en disant que la méthode globale n’était plus du tout employée et qu’on utilisait partout une méthode mixte. Apparemment cela vous satisfaisait.
La méthode mixte dont vous parliez est une méthode semi-globale : elle commence toujours par une phase de lecture globale et elle reste partiellement globale tout au long de l’apprentissage, même si elle comprend l’apprentissage des sons et la lecture de syllabes.
Je suis institutrice et j’ai effectué de nombreux remplacements dans les Hauts-de-Seine. J’ai vu beaucoup trop d’enfants de CP en difficulté devant des mots qu’ils étaient incapables de reconnaître, ne les ayant pas auparavant déchiffrés. C’est une méthode très sélective qui favorise les " physionomistes " puisqu’il faut reconnaître les mots à leur silhouette et les enfants capables de s’inventer une méthode pour les lire. Or tous les enfants doivent pouvoir lire sans problème car la lecture est à la base de tout apprentissage.
C’est incompréhensible qu’une mauvaise méthode, sciemment utilisée, transforme la scolarité de nombreux enfants en parcours du combattant entre orthophonistes et psychologues qui ont bien du mal à réparer les dégâts.
Vous reconnaissez l’existence d’un problème d’apprentissage de la lecture mais vous ne lui voyez aucune cause puisque vous dites dans Le Point que " les difficultés d’apprentissage de la lecture et de l’écriture restent énigmatiques. " Pourtant vous devez bien savoir que votre grand-mère apprenait à lire à ses classes pléthoriques par la méthode syllabique et que ses élèves pouvaient lire les mots avec certitude au lieu d’essayer de les deviner.
Ce n’est donc pas l’effectif qui empêche d’apprendre à lire, comme vous le soulignez, mais plutôt les mauvaises méthodes. Et ce n’est pas l’enfant qui aurait changé, mais la façon de l’instruire et de l’éduquer. On a essayé, à l’IUFM, de nous faire croire que la méthode syllabique n’avait jamais appris à lire, qu’elle apprenait à déchiffrer, donc à ânonner, mais pas à comprendre. Je n’ai pas été convaincue. Et je suis maintenant persuadée qu’il faut réhabiliter la méthode syllabique si on veut vraiment que les enfants apprennent à lire ; elle n’est admise actuellement que pour la rééducation.
Je me permets de vous dire cela parce que la façon dont vous faites travailler votre fille montre que vous savez ce qu'est une bonne méthode. Sur Europe 1 vous vous êtes étonné que les instituteurs n’arrivent pas à faire entrer la grammaire et l’orthographe dans la tête de leurs élèves alors que votre fille après 4 ou 5 dictées sur l’accord du participe passé ne faisait plus de fautes.
Ce qu’un père fait pour ses enfants est généralement ce qu’il pense être le meilleur pour eux et si ce père préside un conseil qui décide de programmes scolaires, il pourrait conseiller de faire pour tous les enfants ce que lui-même fait pour sa fille.
Or la dictée n’est plus, dans les écoles, qu’un exercice hebdomadaire et les nouveaux programmes, vous devez le savoir, déconseillent les exercices répétitifs.
Après avoir suivi la scolarité de mes cinq enfants, je suis devenue institutrice de l’école publique il y a dix ans et j’ai choisi de faire des remplacements. Tant que les programmes et les méthodes ne correspondront pas à ce j’en attends, je garderai ce poste de remplaçante qui me permet de voir différentes écoles et qui me donne tout de même le plaisir d’expliquer, de la façon la plus simple et la plus claire, la grammaire ou les maths à des enfants.
L’échec scolaire est la plus grande injustice de notre temps. C’est insupportable que des enfants soient limités dans leur formation parce qu’on n’a pas réussi à leur faire acquérir les connaissances et compétences indispensables à leur progression. C’est un gaspillage d’intelligence et de moyens.
De nombreux livres ont été écrits sur ce sujet. Silence de plomb ! Il faudrait créer une petite école-pilote de 3 ou 4 classes, spécialisée dans les apprentissages fondamentaux et faire ainsi la démonstration que d’autres méthodes sont efficaces. Le débat sur les méthodes serait ouvert et il se fonderait non sur des théories mais sur des expériences. J’aimerais créer une telle école et je sais très précisément ce que j’y ferais.
Cette école pourrait constituer une étape constructive dans l’évolution que connaîtra fatalement l’enseignement public. En attendant, il serait souhaitable que ceux qui sont chargés des programmes et des méthodes les élaborent pour tous les petits Français comme s’il s’agissait de leurs propres enfants.
J’aimerais pouvoir essayer de vous convaincre de vive voix et serais donc heureuse de vous rencontrer. Je vous prie agréer l’expression de mes sentiments les meilleurs. Tweet |