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LETTRE de l'A.R.L.E. N°45
Association Rhodanienne pour la Liberté dans l'Enseignement
LETTRE de l'A.R.L.E.
N°45 MAI 2003
ÉDITORIAL
de Jean GUY Président de l’A.R.L.E.
Chers Membres de l’Association, Amis ou Lecteurs occasionnels
La vocation de l’ARLE s’est élargie au cours des années afin de promouvoir la Liberté dans l’Enseignement pour tous les établissements de statuts privés et publics. Cette orientation a été confirmée à la dernière Assemblée Générale statutaire tenue en fin d’année 2002 ; réunion qui fut par ailleurs très chaleureuse.
Comment ne pas dénoncer le déficit des formations techniques et professionnelles considérable depuis deux décennies ? Ce contexte va se trouver encore aggravé dès 2006, avec le départ à la retraite des générations du baby-boom. Alors que le chômage obsède la société française, il semble que l’on veuille ignorer l’appel des professions en manque de jeunes compétences. Ces professions offrent pourtant des emplois à des jeunes qui auraient pu construire un projet de vie à partir de leurs propres capacités.
Pour conclure cet éditorial, nous vous faisons part de l’engagement de l’ARLE, aux cotés du Collège Supérieur de Lyon, de l’Institut Montaigne de Paris, et de l’Organisation Internationale pour le Droit à l’Éducation et la Liberté d’Enseignement -OIDEL- en vue de l’organisation à Lyon d’un colloque international sur le thème «Intégration sociale et Autonomie des Établissements scolaires ».
Pour mémoire : M. Roger FAUROUX a prononcé le vendredi 13 juin à l’Hôtel de Ville de Lyon, une conférence(*) introductive et publique à ce colloque. sous le titre :
« L’ÉCOLE AU RISQUE DE LA DIVERSITÉ » (*)
(*)
Il est possible de se procurer le texte de la conférence prononcée le 13 JUIN 2003 auprès de l'ARLE
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UN LYCÉE PROFESSIONNEL ET LES JEUNES D’AUJOURD’HUI
Professeur depuis plus de 30 ans en Lycée Professionnel, dont les 17 dernières années en Lycée Professionnel-Industriel de Lyon, je m’adapte aux réformes qui se succèdent au rythme des Ministres de l’Éducation Nationale…évolution oblige !
Rappelons que l’instruction est obligatoire jusqu’à 16 ans et que, à l’issue du Collège unique, l’orientation des élèves pour les formations professionnelles ne va pas de soi. De plus, «l’apprentissage nécessite le désir de l’élève», comme le dit Philippe Meirieu dans son livre : «l’école et les parents »
Qui sont–ils ces jeunes qui se préparent à un Brevet d’Études Professionnel ou au Baccalauréat Professionnel (bep ou bac.pro) ? D’origine socioculturelle très variée, la personnalité plus ou moins marquée par leur passé, certains désirent apprendre pour s’intégrer socialement à travers le choix d’un métier. D’autres arrivent sans motivation et ne maîtrisent pas les bases de l’enseignement : lire, écrire, compter. Ces lacunes et l’incompréhension qui en résulte, sont à l’origine de gros handicaps et des difficultés à se concentrer et à «digérer » les cours. Les élèves « zappent » comme devant la télévision. Manquant de «repères », ils s’agitent et dérapent vite vers l’agressivité, la violence verbale et parfois physique. Ils ne travaillent plus chez eux, les mots «devoirs et leçons » signifient-ils encore quelque chose ? Ils préfèrent sortir, «rouiller ! » (c.à.d. traîner), fumer…des joints et discuter de foot, de grosses cylindrées, de fringues de marque, … : Société de consommation, époque « du tout, tout de suite », et de la débrouillardise !
Dans son livre «les enfants du veau d’or». Jacques COULON écrit, sans doute avec une nuance d’ironie, que l’École va devenir «comme un grand supermarché» avec l’élève comme client. Il faut espérer qu’il n’en sera rien, même si la culture laisse peu à peu la place au développement des compétences utiles. En Lycée professionnel le savoir est devenu un savoir-être, c’est-à-dire l’aptitude à travailler en équipe et à communiquer ; les nouvelles technologies indispensables pour la compétitivité exigent aussi des capacités pointues.
En septembre 1987, M. Monory, Ministre de l’Éducation Nationale, lançait une filière cohérente avec des objectifs très nobles à travers des classes de 4° et 3° technologiques et avec la perspective des bacs professionnels ; il s’agissait de :
• Découvrir un environnement «pluri-technologique».
Le Lycée Professionnel devenait un vivier où les jeunes découvraient, touchaient des machines, du matériel et retrouvaient confiance en eux.
En 1989, M. Yannick Bonnet, alors Directeur de l’École de Chimie de Lyon, insistait au cours d’une conférence, sur la «valorisation des points forts » dans le but de combattre le sentiment d’échec chez le jeune et de lui faire prendre conscience qu’il est apte à réaliser et donc utile pour lui-même et pour les autres.
Cette période a vu la revalorisation « du professionnel » : Gérard Wiel, professeur- formateur à l’Institut Universitaire de Formation des Maîtres de Lyon, a pu écrire dans son livre intitulé «promouvoir le lycée professionnel comme une voie d’excellence » que le Lycée professionnel n’était plus un«lycée-poubelle ni une impasse » !
De son point de vue, le Lycée Professionnel devait ainsi rester une petite structure séparée du cursus scolaire traditionnel où le jeune pouvait se construire de manière différente pour ne pas amplifier son mal de vivre.
Ce cycle imaginé, sorte de «classes préparatoires au Lycée professionnel », avec ces 4ème et 3ème techno, se trouve décapité dix ans plus tard, en 1998-1999, par le Ministre délégué à l’Enseignement technique et perd sa spécificité par la suppressionde ces classes. Le Lycée Professionnel recrute donc après la classe de 3ème du Collège uniqueet reçoit aussi en grand nombre des jeunes qui ont tenté déjà une seconde générale, voire ceux qui l’ont doublée… !
Le L.P. devient à nouveau le «Lycée–fourre-tout» et les rentrées scolaires de plus en plus difficiles. Comment motiver, revaloriser, (re) donner un sens à la vie à des jeunes en situation d’échec et en quête d’un paradis que certains trouvent déjà dans l’usage d’alcool, de tabac ou de drogue ?
Le constat est sans appel : baisse de niveau, baisse des résultats aux examens, dégradation de l’ambiance de travail. Le spectre du chômage, la corruption ou autres « pourrissoirs de la Société » dénoncés par Jacques BICHOT dans son livre «les autoroutes du mal» contribuent à la détérioration du climat éducatif.
Cependant, l’existence des stages (période de formation en entreprise), les efforts d’information du Mondial des Métiers, ainsi que les Olympiades des Métiers (vitrine du savoir-faire en présentant plus de cinquante métiers) sont autant de moyens qui permettent aux jeunes de découvrir le monde professionnel.
Parmi huit Rhônalpins qui participeront aux 37èmes Olympiades (du 19 au 22 juin 2003 à Saint GALL en Suisse) est sélectionné un de nos anciens élèves technicien du froid (rappelons qu’aux 33èmes Olympiades à LYON, un Lyonnais frigoriste a reçu une médaille d’or). Beau succès pour enrichir le C.V. d’un jeune ! La participation dans la vie du Lycée de l’Association des anciens élèves « frigoristes » de notre Établissement permet de rencontrer les témoins d’un cursus qui s’est achevé pour les plus ambitieux par un bac.pro. et, avec une formation complémentaire, à la création d’entreprise.
Quelle belle récompense et quel bel exemple pour tous : élèves, parents et professeurs !
Pour donner des repères, l’ecjs - Éducation Civique Juridique et Sociale - est mise en place en 2002 dans les lycées professionnels ; les objectifs sont : apprendre à écouter, à se respecter pour respecter l’autre, à se responsabiliser, à s’engager dans des associations… .
Enfin très récemment, le Lycée des Métiers (label crée en 2002), met en valeur l’ensemble de la filière professionnelle et technologique.
Souhaitons que grâce à tous ces efforts et avec le temps, la maturité aidant, le jeune trouve sa voie dans l’espoir d’un avenir meilleur à travers des projets professionnels, familiaux et sociaux.
Pour l’enseignant du Lycée professionnel qui approche la fin de carrière, il n’est pas facile tous les jours de conserver la foi en l’élève, mais « Le PETIT PRINCE » n’a-t-il pas dit au renard, qu’il « fallait apprivoiser …» !
Enseignant la Vie Sociale et Professionnelle (VSP), discipline qui favorise l’insertion sociale à travers 4 domaines : Santé, Environnement, Consommation et Entreprise.
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APPRENEZ-NOUS A RÉFLÉCHIR !
« Apprenez-nous à réfléchir ! » Cette demande surprenante d’un de ses élèves de terminale a poussé Elisabeth NUYTS – Agrégée et chercheur en pédagogie– à s’intéresser aux modes d’apprentissage de la lecture, puis aux personnes (adultes et enfants) en difficulté. Après vingt ans de formations, recherches et pratique, elle nous livre, dans un ouvrage passionnant « L’école des illusionnistes » le résultat de son expérience.
Le constat de «40% d’illettrés» en France, lui fait pousser un cri d’alarme. Comment notre pays, l’un des plus cultivés du monde autrefois, en est-il arrivé là ?
Les nouvelles méthodes d’apprentissage de la lecture, dont celles issues de la dangereuse méthode globale, l’absence de tous repères chronologiques, la nouvelle grammaire, etc., ne peuvent que nuire à la majorité des enfants d’Occident. En effet l’Occidental est un être de la parole, un auditif (5% seulement sont des visuels). Or, on oblige l’enfant, dès le CP, à la lecture silencieuse et rapide et on lui confisque, ainsi, le droit de mettre en mots, de verbaliser ce qu’il lit.
L’hémisphère gauche du cerveau, celui de l’analyse, celui de l’audition, est abandonné au profit de l’hémisphère droit, dont on ne développe que certains aspects, celui de la vision pure et de l’analogie. N’y a t’il pas, se demande l’auteur, une volonté délibérée de créer un homme nouveau, dépendant et manipulable ? En effet, le fait de ne faire marcher que l’hémisphère droit, empêche l’analyse et la réflexion. L’élève ne fonctionne que par reconnaissance visuelle. L’ « auditif » qui a besoin de comprendre pour mémoriser, est perdu.
Ces découvertes étonnantes sur le fonctionnement du cerveau, affinées d’année en année aux USA et en Europe, l’Education Nationale semble les ignorer pour lutter contre l’échec scolaire. Aucune formation officielle dans ce domaine n’est proposée aux professeurs, notamment aux débutants. Quel enseignant, à moins de s’être intéressé personnellement aux travaux d’Antoine de la Garanderie, sait que ses élèves peuvent être auditifs ou kinesthésiques ou visuels et que leur façon d’apprendre n’est pas la même ?
Tous les professeurs de bonne foi retrouveront dans ce livre les constats qu’ils font chaque jour. Ils comprendront enfin d’où viennent ces attitudes préoccupantes qui vont en augmentant chaque année chez leurs élèves : manque de concentration, agressivité, dyslexie ou dysorthographie, impossibilité d’une pensée suivie, carence de lecture et incapacité à analyser un texte.
L’étude approfondie des manuels scolaires et des circulaires du ministère (cf. le B.O. de mars 1995) conforte l’auteur dans l’idée que l’on ne cherche plus à former des êtres indépendants, mais que l’on veut changer la société en changeant le cerveau de l’homme occidental. La télévision, les jeux vidéo participent à cet abrutissement de l’être. Le mal de vivre, l’augmentation des dépressions et des suicides chez les adolescents, la violence ne seraient-ils pas le résultat d’une déstructuration programmée ? Déjà, en 1995, dans un ouvrage intitulé « Machiavel pédagogue », Pascal Bernardin était arrivé à la même conclusion.
Mais Elizabeth Nuyts ne se contente pas de critiquer, elle propose des solutions. Celles-ci viendront davantage des familles et des enseignants récalcitrants que des « pédagogues douteux » qui hantent les IUFM.
Il serait bon que les grands-parents qui ont été bien formé à l’analyse et à la réflexion participent à la formation de leurs petits-enfants, que le réel soit à nouveau notre guide et que l’on permette aux enfants de retrouver les perceptions physiques du monde. Pourquoi ne pas revenir aux passe-temps formateurs de nos anciens (les jeux, les contes) ?
Il ne faut pas délaisser les pratiques traditionnelles que sont l’analyse de texte, l‘étude grammaticale, et l’argumentation, le raisonnement mathématique développé, et la traduction dans l’étude des langues.
Ce livre pourra parfois paraître à certains un peu technique, car on y découvre de nombreux exemples de cas rencontrés et des remèdes appliqués, mais l’auteur a eu le souci constant de rester à la portée de son lecteur et les phrases importantes sont imprimées en gras, ce qui facilite effectivement la lecture.
On ne peut que recommander cet ouvrage très bien documenté, clair et direct, qui, tout en montrant les dangers de la nouvelle pédagogie, nous donne les moyens de lutter contre l’instauration de « ce meilleur des mondes » que, consciemment ou non, l’on nous prépare.
un Professeur de Lycée
Note « L’École des Illusionnistes » ouvrage auto-édité d’Elisabeth NUYTS a reçu le Prix de l’Association Enseignement et Liberté en 2002 ; si dans votre entourage vous avez des professeurs, offrez leur ce livre il leur sera utile. Il est possible de le commander à M.J. VAILLE, 66 ,rue Azalaïs d’Altier, 34080 Montpellier, 20 € + 3 € pour les frais de port.
« Machiavel Pédagogue » Pascal BERNARDIN – édition Notre-Dame des Grâces –
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Réflexions autour du livre
(1) de Yannik BONNET(*)
« Les neuf fondamentaux de l’éducation
(1) » et conférence à Valpré le 20 février
(*)
Rappel : Yannik Bonnet, polytechnicien, docteur en chimie, après avoir exercé des responsabilités variées dans l’Industrie, il a dirigé pendant onze ans l’École Supérieure Industrielle de Chimie de Lyon, puis a créé sa propre entreprise. Père de sept enfants, il a eu la douleur de perdre sa femme en 1995, mais très vite il sait que « Dieu l’appelle à son service», après trois ans de séminaire à Rome , il est ordonné prêtre au Puy le 14 juillet 1999.
Le résumé de cette vie est déjà un témoignage. Le Père Yannik BONNET voit dans l’éducation le plus grand problème du 21ème siècle et il nous entraîne soit dans son livre, soit dans son exposé, à une réflexion claire, argumentée, approfondie, réaliste mais toujours optimiste. La joie intérieure anime cet homme.
Dans son livre, Y. BONNET regroupe ses neufs fondamentaux autour de trois points :
Chacun de ces points comporte trois fondamentaux,
pour le premier :
pour le second :
enfin pour le troisième point :
Telle est l’architecture du livre publié aux presses de la Renaissance dont nous recommandons la lecture à tous ceux que préoccupent les problèmes de l’éducation.
Mais rien ne vaut la présence de l’auteur : « la parole vivante » et chaleureuse.
Ainsi, au cours de sa conférence (nous étions trois membres de l’A.R.L.E.) malgré une panne d’électricité et à la lueur de cierges, nous avons pris quelques notes et nous vous les livrons un peu en vrac, surtout les formules percutantes.
Il remarque tout d’abord que trois cellules essentielles jouent leur rôle dans l’éducation : La famille avec l’école et l’entreprise.
a propos de la cellule familiale et des Parents :
Yannik Bonnet remarque que par nature la famille a en charge l’éducation, mais c’est elle qui a le plus souffert de la « non éducation » ; Il insiste sur le respect dû à l’enfant «être unique », l’éducation se fait dès la sortie de la clinique et «il n’y a pas plus grand manipulateur qu’un nouveau-né »… il doit apprendre à laisser dormir ses parents… !
Un peu plus tard… il faut aider l’enfant à devenir un être social autonome, c’est à dire «faire ce que l’on veut sauf ce qui est interdit ». On ne peut tolérer tous les comportements, c’est la personne que l’on tolère. Pour aider les enfants à se forger une personnalité forte il faut leur accorder une solide confiance, développer leurs points forts et corriger après… leurs points faibles.
Au cœur de la cellule familiale le père dit la loi «tendresse virile ». La mère est «le juge d’application des peines », autre formule : la mère est «bonne diagnostiqueuse mais mauvaise thérapeute » ou encore «les papas poules font des enfants moules »….
A propos de l’école
:
Un constat : l’hyperféminisation du monde éducatif,
a propos du monde du travail
La vie professionnelle exige des vertus morales, la conscience professionnelle est de cet ordre…de même que l’adaptabilité qui exige l’humilité….
sur la société dans laquelle nous vivons
:
La crise de 1968/70, aidée par l’augmentation du pouvoir d’achat, a provoqué ou favorisé un matérialisme inquiétant avec pour conséquence une crise spirituelle suivie d’une crise de médias et technologie du virtuel ».
et la crise de la morale :
Elle n’est plus à démontrer, exemple « il est interdit d’interdire ». Ce refus des contraintes explique le fossé qui s’est établi entre les exigences du monde du travail et le laxisme de l’éducation.
En guise de conclusion terminons sur une note plus optimiste : Selon saint Thomas le but de l’éducation c’est la recherche d’un bonheur vrai fondé sur un idéal ; il faut aider les enfants et les adolescents à trouver un sens à leur vie, à découvrir la noblesse du travail et à développer leurs capacités à aimer Tels sont quelques échos incomplets de cet exposé. Il aurait fallu pour être fidèle évoquer l’apprentissage du travail en équipe et en même temps de l’autonomie, le respect de l’autre sans compromission avec le mal.
Aux questions posées à la fin de la conférence le Père BONNET a recommandé « une réflexion prudentielle» dans chaque choix éducatif. Une telle conférence a été une sorte de ressourcement malgré une époque « accablante ».
(1) Références du livre de Yannik BONNET : les neuf fondamentaux de l’éducation. - Presse de la Renaissance
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