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Lettre N° 3 - A PROPOS D'ÉDUCATION (3)
Le système éducatif national est en ébullition depuis le 10 mai 1981. Il représente probablement le domaine de choix où peuvent s'affronter les idéologues ; où les analystes peuvent satisfaire leur passion gourmande des bilans comparés de gestions privée, nationale ou étatique. Il représente en effet le plus grand échec de la gestion étatique de la France des trente dernières années au cours desquelles selon un consensus parfaitement équilibré depuis un quart de siècle, c'est la Gauche qui assuma l'enseignement, tandis que la Droite gouvernait. L'échec scolaire est donc bien l'œuvre de la Gauche. La frénésie qui a saisi depuis plus d'un an les responsables et les animateurs du système que sont les syndicats de gauche, S.N.I., SNES et SNESUP, traduit à la fois la libération des phantasmes et le besoin rageur de masquer l'échec. Le premier phantasme qui se voit ainsi manifesté, exprime le besoin rentré des militants majoritaires de terminer la guerre scolaire, interrompue par les guerres militaires ; il s'agit de la poursuivre jusqu'au terme pour imposer "l'École du peuple", gratuite, obligatoire et matérialiste. Il ne convient plus en effet d'utiliser le terme trop éculé de laïque... Le deuxième phantasme propulsé au grand jour fonde le projet syndicaliste d'école unique ; il traduit un des aspects de la rage d'unification qui anime ces prosélytes et qui se trouve en contradiction flagrante avec leur soif inaltérable de diversification... Mais le monopole politique est à ce prix..., celui d'un seul Ministre regroupant sous sa houlette tous les bambins de 2 ans et les étudiants de trente ans, moments biologiques particuliers du processus d'égalisation totalitaire et coagulante du collectivisme en marche. Ce n'est là d'ailleurs qu'une étape, qui précède sans doute l'intention de transposer en France le système des Académies soviétiques fanatiques et totalitaires. Il eût été logique de penser que le recul des pratiques religieuses dans notre pays devait apparaître comme un facteur favorisant le processus d'absorption, potentialisé par le glissement massif des structures catholiques dans le camp socialiste. L'agressivité observée à l'égard de l'École privée connaît des mobiles plus profonds dont l'aspect religieux n'apparaît que comme la partie émergée de l'iceberg. L'École privée offre, dans une certaine mesure, une solution de rechange, elle permet aux familles de retrouver pour les enfants des modes et des méthodes d'instruction, de formation et d'éducation, qui, s'il n'est pas trop tard, peuvent consolider ou donner cohérence au bagage de l'adolescent. L'École privée par la désaffection qu'elle induit à l'égard du système d'État, par l'attrait qu'elle exerce, est un témoin de l'échec de l'École publique ; elle doit donc disparaître. Ces conflits, ces polémiques traduisent certes une démarche marxiste où l'École apparaît comme une arme de guerre redoutable aux mains d'habiles stratèges. Il reste pourtant que d'autres questions doivent naître d'un constat d'échec, car l'échec, lui, n'était pas au programme. Et ces questions laissent les leaders sans réponses parce qu'elles ressortissent à l'évolution du système confronté au monde et au progrès technologique en marche. Ainsi l'Éducation Nationale n'assure plus aux citoyens de ce pays l'acquisition du savoir de base ; elle n'assure pas davantage les savoirs et les savoir-faire différenciés qui devraient s'articuler sur ce savoir de base. Elle ne garantit donc pas aux Français les possibilités d'adaptation et de mutation qu'exigent pour tout peuple l'évolution des sociétés et les mutations technico-scientifiques. L'Éducation Nationale n'ayant plus d'objectifs clairs, simples et définis disperse ses énergies dans le maquis des idées fumeuses, des missions contradictoires et des projets inapplicables. Pour socialiser les enfants, elle a voulu faire de l'éducation un domaine réservé sans le fonder sur un code défini de valeurs puisqu'elle aurait dû emprunter ce code à des institutions plus anciennes. Il en est résulté l'échec de l'éducation stricto sensu. Ayant renoncé à instruire devant l'ampleur des savoirs qu'elle ne maîtrisait plus, elle a tenté de disqualifier l'instruction en la noyant dans le maquis de la socialisation des jeunes au service de laquelle furent remaniés tous les contenus éducatifs. Tous les biais et tous les poncifs furent exploités jusque et y compris l'éducation sexuelle au Collège pour ne citer que cet exemple. Enfin, l'Éducation Nationale évacua ses insuffisances dans l'illusion de la diversification, voulant faire de toute substance d'enseignement un support éducatif qui devenait ainsi l'artifice démagogique du maintien de son monopole. Le dernier aspect de cette double méprise est bien donné par le rapport LEGRAND qui confond les données essentielles de la Biologie avec celles de la Sociologie. LEGRAND fait de l'ancienneté un facteur de compétence et de progression tandis qu'il trompe sur la réalité des handicaps induits par le système et les niveaux d'efforts nécessaires pour les dominer et les inverser... Enfin, comble d'ironie dans un pays en voie de sous-développement socialiste, il propose... presque un précepteur à chaque élève sans en indiquer les critères de choix... Il reste donc, face à ce contexte d'incidences et d'intérêts contradictoires à dégager quelques grands principes qui puissent fonder l'éducation. La question est posée depuis l'Antiquité et la notion d'utilité de l'école a été suffisamment définie par ARISTOTE pour ne pas avoir à y revenir. Aujourd'hui, tandis que se dessine un monde différent sous la poussée du progrès technico-scientifique, l'École reste nécessaire et utile. L'ampleur des savoirs, des habiletés et des savoir-faire à maîtriser et à accompagner dans leur évolution suppose des enchaînements logiques et des articulations de transfert appropriés. Un savoir de base est donc nécessaire. Il doit être dispensé aux jeunes lors de la période d'aptitude à l'acquisition qui est la leur. Il doit être dispensé par des maîtres formés pour cela, nécessairement compétents et choisis. Les savoirs différenciés et les habiletés, par essence évolutifs, ne peuvent être enseignés que selon des modalités adaptées à l'évolutivité de ces savoirs, selon des rythmes souples, par des personnes ou des enseignants qualifiés et reconnus aptes à l'application pédagogique de leurs connaissances... L'éducation dans l'affaire est toujours une résultante, si l'on se réfère à J.-J. ROUSSEAU, peu suspect dans le monde enseignant et qui écrivit que l'on n'"EST CURIEUX QU'EN PROPORTION QU'ON EST INSTRUIT". Elle est pour une part compétence familiale ou d'ordre moral ; pour l'autre part, elle est conséquence de l'œuvre de l'école. Il en résulte bien évidemment que l'École ne puisse pas exercer sur l'enfant et l'adolescent un monopole, même partiel, sans attenter dans son principe à la finalité de l'éducation qui, selon KANT est "DE DEVELOPPER DANS L'INDIVIDU TOUTE LA PERFECTION DONT IL EST CAPABLE". Puisque cet objectif ne peut relever en aucun cas d'un seul système. Et puis, pour une telle entreprise, ne convient-il pas de disposer de maîtres authentiques, et dans tous les cas, dont la manifestation ne puisse être que référence qualitative. La jeunesse a d'abord et surtout besoin de parents et de maîtres pour fixer parmi eux ses points d'ancrage. Le souci d'un sens exact et juste de la discipline doit conduire les adultes à organiser attitudes et comportements de telle manière que l'esprit de discipline soit admis par une jeunesse qui en éprouve le besoin pour maîtriser ses acquis et sa formation d'adulte. Pour satisfaire l'équilibre et l'harmonie de l'homme adulte, il est réaliste de penser que certaines phases, certains aspects de cette construction réclament une certaine logique d'enchaînement des processus. Les interférences, les accélérations et les courts-circuits du monde actuel peuvent donc constituer des facteurs d'inadaptation ou d'immaturation qui fragilisent la construction finale et rompent l'harmonie de l'ensemble. Il convient donc et d'abord pour que l'éducation des jeunes soit réussie que les mentalités changent. Les parents sont les premiers concernés par cet effort de conversion. Les habitudes d'assistance et de protection comme d'hyperconfort dans l'irresponsabilité et la peur de vivre auxquelles se sont livrés nos contemporains ne confèrent en aucun cas le profil de référence que peut rechercher un enfant sur le visage de son père ou de son maître. La véritable éducation est d'abord une stimulation permanente pour une identification authentique. Eduquer la jeunesse, c'est donc la conduire assez loin sur les chemins de la vie et lui donner assez d'armes et de références pour qu'elle garde l'espérance et qu'elle vive d'enthousiasmes. Il faut dégager pour elle des horizons purs, des raisons de vivre, des justifications d'existence tels qu'elle en fasse les substrats de sa propre transcendance. RECTEUR Pierre MAGNIN
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